Istanpitta / Henri Agnel et al.
Danses florentines du Trecento





medieval.org
Alpha 510
Les chants de la terre

Production 2003 | © 2004 Alpha







1. Istanpitta Tristano & Manfredina  [6:33]
Prélude de flûte  [1:18]
Lamento de Tristano  [2:40]
Lamento de la Manfredina  [1:03]
Rotta de Tristano  [0:53]
Rotta de la Manfredina  [0:39]


2. Istanpitta Ghaetta  [12:29]
Prélude de cistre  [2:25]
Prélude Ghaetta (Henri Agnel)  [3:02]
Ghaetta  [3:36]
Sento d'amor la Fiamma (Gregorio Calonista)  [3:26]


3. Istanpitta In Pro  [6:09]
Prélude de quinton  [1:01]
In Pro  [5:08]


4. Istanpitta Chanconetta Tedescha  [5:02]
Prélude de ceterina  [1:24]
Chanconetta Tedescha  [3:38]


5. Istanpitta Saltarello  [3:43]
Prélude de flûte  [1:05]
Saltarello à 4 temps  [2:38]


6. Istanpitta Saltarello & Trotto  [7:06]
Prélude de zarb  [3:00]
Saltarello à 5 temps  [2:25]

Trotto  [1:41]

7. Istanpitta Isabella  [6:37]
Prélude de oud  [2:57]
Isabella  [3:41]

8. Istanpitta Tre Fontana  [5:06]
Prélude de quinton  [3:00]
Tre Fontana  [2:06]

9. Istanpitta Saltarello  [4:22]
Prélude de ceterina, quinton & flûte  [1:40]
Saltarello à 6 temps  [2:42]




Henri Agnel, cistre, ceterina, oud, arrangements & direction

Michael Nick, quinton
Henri Tournier, bansouri
Djamchid Chemirani, zarb
Idriss Agnel, oudou




Michael Nick :
joue sur un quinton (violon a cinq cordes) accordé Do, Sol, ré, la, mi (violon et alto en un seul instrument).
Ce quinton est agrémenté de sept cordes sympathiques un peu comme la viole d'amour ou les instruments à cordes indiens.
Luthier : André Sakellarides.

Henri Tournier :
joue sur des flûtes traversières en bambou d'Inde o « bansouri » / Luthier : Harsh Wardhan.

Djamchid Chemirani :
joue sur un zarb ancien iranien / Luthier : Anonyme.

Idriss Agnel :
joue sur un oudou (brésilien) ou gatam (indien) / Luthier : Nathalie Pierlot.

Henri Agnel :
joue sur un cistre (copie Renaissance) accordé Ré, La, ré, sol / Luthier : David Rubio.
Aussi sur une cetera médiévale accordée Do, Sol, do, fa / Luthier : Marcelo Ardizzone.
Et un oud (luth arabe) accordé Ré, Sol, La, ré, sol, do, fa / Luthier : Frédéric Pinard.



Enregistré à Paris, en mars 2003
Chapelle de l'hôpital Notre-Dame de Bon Secours

Prise de son, direction artistique & montage numérique : Hughes Deschaux

Photographies : Robin Davies







English liner notes




Ces estampies italiennes sont rassemblées dans un manuscrit unique de la fin du XIV' siècle: British Museum additional 29987. Ce manuscrit anonyme était la propriété d'une famille italienne de Florence dont nous ne connaissons pas le nom. Au Moyen Age on n'a pas pour habitude de signer les oeuvres.

La tradition et la transmission sont orales et les manuscrits, partitions musicales, sont rédigés après avoir été appris et interprétés.

Quand on retrouve plusieurs manuscrits de la même oeuvre, par exemple chez les troubadours, les trouvères et les Cantigas de Santa Maria, on remarque des différences mélodiques et instrumentales qui montrent bien la liberté laissée aux interprètes. Ce qui compte, c'est l'esprit, l'âme de la musique, sa poésie, sa philosophie, les références auxquelles elle se rattache.

Il est difficile de marquer nettement la frontière entre le compositeur et l'interprète, les deux ayant une part créative. L'interprète dispose d'une composition de base qui est un chant profane ou liturgique souvent connu de son auditoire et à partir duquel il va improviser, orner, développer une estampie instrumentale rythmée (estampie: stamp = frapper, rythmer) utilisant en référence les rythmes des danses connues à l'époque (saltarello: danse de la sauterelle, tedescha: allemande, pavane, gaillarde, branles, ...). On peut tout à fait imaginer ces estampies italiennes figées, là, dans ce manuscrit dans une forme momentanée de l'évolution de l'oeuvre, développée sur différents modes rythmiques mais aussi mélodiques.

La forme de l'estampie est construite suivant la formule: couplets-refrains (ouvert et clos). Et déjà dans cette construction, une liberté d'organisation est possible: le couplet ou point (punctus, pars) est le moment soliste (même si le couplet peut être joué à plusieurs, mais à ce moment-là il s'est fixé et chacun peut l'orner à sa manière). Il s'enchaîne au refrain ouvert qui appelle à un recommencement puis, soit répétition du même couplet soit utilisation du couplet suivant qui s'enchaîne avec le refrain clos qui conclut. Ce qui offre la possibilité de finir là ou, de redémarrer sur un autre couplet qui s'enchaînera à son tour sur le refrain ouvert. Puis ce couplet ou un autre s'enchaînera sur le refrain clos et ainsi de suite. On peut tout à fait ne prendre que les refrains et improviser les couplets.

FORMES :
1°)
couplet 1 - refrain ouvert
couplet 1 - refrain clos
couplet 2 - refrain ouvert
couplet 2 - refrain clos, etc.
2°)
couplet 1 - refrain ouvert
couplet 2 - refrain clos
couplet 3 - refrain ouvert
couplet 4 - refrain clos, etc.

On se demande si ces estampies étaient dansées ou non, je pense que les deux sont possibles. Il est évident que lorsqu'elles sont dansées, elles s'adressent à des danseurs confirmés et que l'interprétation musicale demande des musiciens virtuoses. On peut imaginer deux approches différentes :

Quand elles sont dansées, elles sont organisées pour cette fonction, ce qui expliquerait les quelques fois où la mesure choisie peut s'augmenter d'un temps ou plus par moment, et qui correspondrait à certains pas des danseurs. On retrouve souvent cela dans les danses de la Renaissance sur lesquelles nous avons trouvé plus de documents concrets clairement expliqués (dans le manuscrit original nous nous demandons parfois pourquoi, lorsque nous mettons en place des barres de mesures signifiant rythme, nous nous retrouvons sur certaines mesures avec quelques temps en moins, ou quelques temps en plus).

Quand elles servent le seul plaisir de l'interprétation musicale, en musique de chambre, elles peuvent être organisées dans cette optique et les mesures qui posent questions ont moins d'intérêt.

C'est le parti que j'ai pris. Je les ai organisées autour de rythmes constants, ce qui me permet de les jouer avec des percussionnistes de rencontre sans être obligé de leur mettre une partition sous le nez, ou avec des instrumentistes mélodistes auxquels il me suffit de faire entendre le refrain (ouvert et clos). Pour les couplets nous les improvisions en alternance, en duo, ou plus à notre guise. Ce qui rallie les musiques monodiques médiévales européennes en général â la grande famille des musiques modales du Maghreb, du Proche-Orient, des Pays Arabes, de Perse, de Grèce et jusqu'à l'Inde, et, étonnamment aux musiques modernes comme le jazz et le jazz-rock.

Les musiciens de jazz utilisent une forme proche du couplet-refrain : thème, chorus d'un instrument, thème, chorus d'un autre instrument, thème, ... Ils ont développé leurs connaissances dans les modes, ce qui permet une plus grande liberté dans l'improvisation au-dessus d'harmonies de plus en plus complexes, et donne la possibilité de rencontre avec des musiciens de traditions modales de différents pays. C'est grâce à ma connaissance des modes et des compositions monodiques médiévales et orientales, que j'ai pu dialoguer musicalement avec des musiciens de traditions monodiques autant qu'avec des jazzmen.

Cela remet les musiques médiévales dans l'actualité du XXle siècle.

Je ne peux me résoudre à ne pratiquer la musique médiévale que dans sa reconstitution historique, ce qui la fige.

Ce qui est certain, c'est qu'à l'époque la musique est mouvante, composée puis réinventée, jouée différemment d'une région à une autre, d'une famille de musiciens à une autre, d'un maître à un autre. Et l'improvisation, et l'ornementation, et l'art de préluder, ... Tant d'espaces de liberté qui ne méritent pas de cloisonnement.

J'ai eu la chance de naître dans une famille de musiciens français, vivant au Maroc et profondément épris de l'art de ce pays. Par tradition familiale, nous étudions dès l'enfance la musique dassique, ce qui m'a amené, par la suite, à comparer les musiques monodiques européennes avec la musique arabo-andalouse, puis avec les musiques arabes, persanes, indiennes et grecques. Je suis allé étudier les ingrédients, les techniques instrumentales, les techniques d'improvisations, d'ornementations, le respect du mode avec ses notes principales et ses notes secondaires, la géométrie qui permet de construire une improvisation qui ne soit pas seulement l'énoncé des notes de la gamme, mais un développement harmonieux équilibré et spontané, dans le respect de l'esprit, de la sensibilité du mode au service du chant ou de l'estampie que l'on introduit et interprète. Il est évident que les points communs des traditions monodiques n'ont d'intérêt qui si l'on tient compte aussi des différences. On entend très clairement la différence qu'il y a entre un musicien du nord de l'Inde et un musicien persan ou arabe, ... Mais, par contre, il est très facile pour eux de jouer ensemble sur le terrain de l'improvisation. Il en va de même pour les musiques médiévales européennes. On doit s'exprimer différemment quand on joue des estampies italiennes ou françaises, des Cantigas de Santa Maria, des chants de trouvères ou de troubadours. Les points communs restent et les différences s'affirment.

Pour comprendre l'esthétique d'une musique, quand les manuscrits théoriques sont rares ou inexistants, il est bon de se référer à la poésie, à la philosophie, à la religion mais aussi à l'architecture, à la beauté de l'enluminure, à l'artisanat, aux vêtements, ... qui donnent des idées assez claires sur la société dans laquelle elle s'inscrit. Et, là encore, les comparaisons avec des sociétés qui n'ont pas perdu leurs traditions sont enrichissantes. La similitude dans l'expression de l'amour: idéalisé, parfait, philosophique, sensuel, sexuel, drôle, satirique est indéniable. On rassemble du Maghreb au Proche-Orient cil passant par l'Inde, les poésies d'amour courtois chantées sont le nom de «ghazal », style de beauté. Nous avons donné à la gazelle ce nom qui représente sa beauté pure, fine et ses yeux d'une sensibilité , sensuelle profonde. Les chants des troubadours, des trouvères, des minnesanger, du Trecento italiano, . . . peuvent s'intituler «ghazal».

Nous jouons ici, dans ce répertoire d'estampie, une chanson instrumentale «Sento d'amor la fiamma», ballata de Gregorio Calonista (codex Squarcialupi: Laurentius Masii de Florentia) :
Sento d’amor la fiamma e‘l gran podere
E veggio che temere
Non si convien chi vuol vincer la prova.

Ma se fiereza in questa ogrior si trova,
De’ che faro ?   
I’ tel diro :   

Perseverando vincero la guerra.
Non fu d’amor già mai donna si nova
Che, s’ i’ vorro
E seguiro,
Con suo’ potenza Amor noua dissera.
Non sia pero l’ ardir contra ‘l dovere;
Anzi si vuol calere
Che sdegno di pietà nolla rimova.

Je sens d'amour la flamme et la puissance
Et vois que pour triompher
Il faut bannir la crainte.

Mais si on ne recontre toujours qu'orgueil chez cette femme,
Hélas ! Que ferai-je ?
Je vais te dire:

C'est en persévérant que sera gagnée la guerre.
Il n'est de femme n'ayant connu l'amour
Qui, si je le veux
Et l'entoure de mes soins
Ne laisse son cœur s'ouvrir à lui.
Que la hardiesse ne heurte toutefois la bienséance,
Car il faut prende garde
Que l'indignation ne la détourne de l'attendrissement.
On trouve au Moyen Age, un très grand nombre d'instruments représentés sur les enluminures, sur les statues, ou sur les vitraux des églises et des cathédrales. On n'indique jamais, par contre quel intrument doit jouer telle ou telle oeuvre. La raison en est simple: la monodie est accessible à tous les instruments et l'instrumentiste doit adapter ce qu'il joue aux possibilités offertes par celui-ci. Aujourd'hui, on s'attache à rejouer ces musiques sur des reconstructions d'instruments d'époque ce qui nous a beaucoup apporté et beaucoup appris. Mais l'art monodique est ouvert à tous les instruments, ainsi les indiens et les arabes ont intégré des instruments occidentaux dans leur musique: violon, clarinette, harmonium, accordéon, saxophone, synthétiseur, ... Les musiciens arabo-andalous, ont eux remplacé le kamanché par le violon, intégré le piano, le banjo, le violoncelle... Pourquoi dans la musique médiévale qui permet les mêmes emprunts ne le ferions-nous pas? D'expérience je sais, que l'esprit de la musique est plus important que l'instrument de musique qui porte bien son nom: «instrument ». Il est important de jouer sur celui que l'on aime et avec lequel on va pouvoir s'exprimer avec sensibilité et virtuosité.

Henri Agnel










These Italian estampies are assembled in a single manuscript dating from the end of the fourteenth century: British Museum Additional 29987. The anonymous manuscript was the property of a Florentine family whose name is unknown to us. In the Middle Ages it was not customary to sign works. Tradition and transmission were oral, and musical manuscripts were written out once the music had already been learnt and performed.

When several manuscripts of the same work are known, as is the case with the troubadours, the trouvères and the Cantigas de Santa Maria, one notices differences of melody and instrumentation that clearly show the freedom left to performers. What counts is the spirit, the soul of the music, its poetry, its philosophy, its points of reference. It is difficult to draw a clear line between composer and performer, for both have a creative role to play. The performer has at his disposal a basic composition, a secular or sacred song melody often known to his hearers, on which he will improvise, ornament, build a strongly rhythmic instrumental estampie (the word is cognate with 'stamp' in its English meaning of beating out a rhythm), taking as his reference the characteristic dance metres of the time, such as the saltarello (leaping dance'), tedescha (German dance'), pavan, galliard, and branle. It is perfectly possible to imagine these Italian estampies, set down in the manuscript in a form that represents a moment in their evolution, being developed in different manners, both rhythmic and melodic.

From a formal point of view, the estampie is based on the scheme of verse and refrains (open and closed). And already, within this structure, a degree of freedom of organisation is possible: the verse or 'point' (punctus, pars) is the moment for solo performance (even though the refrain may be played by several instrumentalists, in which case it remains fixed but each performer may ornament it after his own fashion). It leads into the open refrain, which entails either a repetition of the same verse or a move to the next verse, which will then lead to the closed refrain that concludes the scheme. This in its turn offers the possibility of either ending the performance at this point or launching into a new verse that will duly lead to the open refrain. Then this verse or another will lead to the closed refrain, and so on. It is quite plausible to use only the written refrains and improvise the verses.

FORMS:
1°)
verse 1 - open refrain
verse 1 - closed refrain
verse 2 - open refrain
verse 2 - closed refrain, etc.

2°)
verse 1 - open refrain
verse 2 - closed refrain
verse 3 - open refrain
verse 4 - closed refrain, etc.

There is some debate as to whether these estampies were danced or not; I believe both options were possible. It is obvious that, when danced, they require skilled dancers, and that the musical performance calls for virtuoso instrumentalists. We can imagine two different approaches:

When they are danced, they are organised with that in mind, which would explain why from time to time a beat or more is added to the chosen metre — this must correspond to particular steps for the dancers. This is a frequently recurring phenomenon in Renaissance dances, for which more explicit documentation exists (in the original manuscript we sometimes wonder why, when we insert bar lines to indicate the rhythm, we end up in certain bars with additional beats or missing beats).

When they are intended for sheer musical pleasure, as chamber music, they can be organised from that perspective, with the problematical bars then becoming less relevant.

I have taken the latter option. I have organised the dances around constant rhythms, which allows me to play with new percussionists without showing a score in front of them, or with players of melody instruments to whom I just have to play the refrain (open and closed). As for the verses, we improvised them in alternation, singly, as duets, or more as the fancy took us. This method brackets European monophonic music of the Middle Ages with the broad family of modal musics that stretches from the Maghreb, the Near East, the Arab countries, Persia, and Greece to as far off as India — and also, astonishingly, with modem musical styles such as jazz and jazz-rock.

Jazz musicians utilise a form close to that of verse-refrain: theme, chorus on one instrument, theme, chorus on another instrument, theme ... They have developed their knowledge of modes, which allows them greater liberty in improvisation over increasingly complex harmonies, and offers the possibility of encounters with musicians from the modal traditions of different countries. It is thanks to my knowledge of medieval and oriental modes and monophonic compositions that I have been able to interact with musicians from monophonic traditions as well as with jazzmen. The result is to bring medieval music into the twenty-first-century mainstream.

I cannot resign myself to practising medieval music only as historical reconstitution, which rigidifies it. One thing we can be sure of is that in its own time the music was fluid, composed then reinvented, played differently from one region to another, from one family of musicians to another, from one master to another. Then there was improvisation, and ornamentation, and the art of preluding ... all those areas of freedom that do not deserve to be compartmentalised.

I was fortunate to be born into a family of French musicians living in Morocco and deeply in love with the art of that country. By family tradition, we study classical music from childhood, which led me later on to compare European monophonic music with Arab-Andalusian music, then with Arab, Persian, Indian and Greek music. I went to study their ingredients, instrumental techniques, techniques of improvisation and ornamentation, the respect of the mode with its principal and secondary notes, the
geometry that makes it possible to construct an improvisation that is not merely a bald statement of the notes of the scale, but a harmonious development, balanced and spontaneous, mindful of the spirit and sensibility of the mode, always at the service of the song or estampie that one introduces and interprets.

It is obvious that the common features of the various monophonic traditions are of interest only if one also takes account of their differences. The difference between a musician from north India and a Persian or Arab musician is clearly perceptible. Yet it is very easy for them to improvise together. The same holds true for medieval European music. One must use different means of expression when playing French or Italian estampies, Cantigas de Santa Maria, trouvère or troubadour songs. The common features remain, and the differences assert themselves.

To understand the aesthetic world of a style of music when theoretical manuscripts are rare or nonexistent, it is useful to turn to poetry, philosophy, religion, but also to architecture, to the beauties of illumination, to handcrafted objects, to clothing — all of these can give a fairly clear idea of the society of which such music was a part. And, here too, comparisons with societies that have not lost their traditions are a source of enrichment. The similarities in the expression of love — idealised, perfect philosophical, sensual, sexual, comical, satirical — is undeniable. From the Maghreb to the Near East to India, one finds poems of courtly love sung under the name of ghazal, the style of beauty. This name has been given to the gazelle for its pure, delicate beauty and its deeply sensual eyes. The songs of the troubadours, the trouvères, the Minnesingers, the musicians of the Italian Trecento could all be entitled ghazal.

We play here, in this estampie repertory, the instrumental song 'Sento d'amor la fiamma', a ballata  by Gregorio Calonista (Squarcialupi Codex: Laurentius Masii de Florentia). Here is its text:

Sento d’amor la fiamma e‘l gran podere
E veggio che temere
Non si convien chi vuol vincer la prova.

Ma se fiereza in questa ogrior si trova,
De’ che faro ?   
I’ tel diro :   

Perseverando vincero la guerra.
Non fu d’amor già mai donna si nova
Che, s’ i’ vorro
E seguiro,
Con suo’ potenza Amor noua dissera.
Non sia pero l’ ardir contra ‘l dovere;
Anzi si vuol calere
Che sdegno di pietà nolla rimova.

I feel love's flame and its great power,
And I see that he must not fear
Who desires to carry off the prize.

But if she remains obdurate,
Alas, what will I do?
I will tell you:

Through perseverance I will win the war.
There has never been a lady so inexperienced in love
That, if I so wish it
And persist in my attentions,
Love cannot make her yield to his power.
Yet let not boldness run counter to propriety,
Rather let us take care
That indignation does not harden her heart.

There survive from the medieval period a large number of representations of instruments in illuminated manuscripts, statues, or stained-glass windows in churches and cathedrals. However, there is never any indication, in the surviving music, of which instrument.is to play such and such a piece. The reason for this is a simple one: monophony is accessible to any instrument, and the player must adapt what he performs to the possibilities offered by his own instrument. Today much care is lavished on playing this music on reconstructions of period instruments, a process that has enriched us and taught us a great deal. But monophonic art is open to all instruments, which has led the Indians and the Arabs to integrate Western instruments into their repertory: violin, clarinet, harmonium, accordion, saxophone, synthesizer and so forth. Arab-Andalusian musicians, for their part, have replaced the kamancha fiddle with the violin, and added the piano, the banjo, and the cello. Why should we not do the same in the medieval repertory, which admits of the same borrowings? I know from experience that the spirit of the music is much more important than the specific instrument — which is exactly what it says it is: an instrument. The important thing is to play the instrument one likes, on which it becomes possible to express oneself with sensitivity and virtuosity.

Henri Agnel
Translation: Charles Johnston



Michael Nick:
plays a quinton (five-stringed violin) tuned c-g-d'-a'-e" (violin and viola in a single instrument).
The quinton is fitted with seven sympathetic strings, rather like the viola d'amore or Indian stringed instruments.
Maker: André Sakellarides

Henri Tournier:
plays Indian bamboo flutes (bansura) / Maker: Harsh Wardhan

Djamchid Chemirani:
plays a traditional Iranian zarb / Maker: Anonymous

Idriss Agnel:
plays an udu (Brazilian) or gatam (Indian) / Maker: Nathalie Pierlot

Henri Agnel:
plays a cittern (copy of Renaissance model) tuned d-a-d'-g" / Maker: David Rubio
also a medieval cetera tuned c-g-c'-f' / Maker: Marcelo Ardizzone
and an ‘oud (Arab lute) tuned d-g-a-d'-g'-c"-f' / Maker: Frédéric Pinard