DUFAY. Le Prince d'amours / Ensemble Gilles Binchois
evidenceclassics.com
Evidence EVCD082
2021
Dufay, le Prince d'amours
Références
Dufay, le Prince d’amours
References
1. Par droit je puis bien complaindre et gemir [3:29] rondeau
2. Dona gentile, bella come l’orou [4:33] rondeau
3. Belle, que vous ay je mesfait [2:21] instrumental version
4. Les douleurs dont me prends tel somme [5:06] rondeau
5. L’alta belleza [2:42] ballata
6. Je ne suy plus tel que souloye [2:24] rondeau
7. Adieu m’amour, adieu ma joye [5:21] rondeau
8. He compaignons, resvelons [2:30] instrumental version
9. Ce moy de may soyons lies et joyeux [3:42] rondeau
10. Estrinez moy, je vous estrineray [3:39] rondeau
11. Ce jour le doibt, aussi fait la saisone [4:] ballade
12. Ne je ne dors, ne je ne veille [5:34] rondeau
13. Resvelons nous, resvelons amoureux / Alons ent bien tos au may [0:44] chanson
14. Pour l’amour de ma doulce amye [3:51] rondeau
15. Mille bonjours je vous presente [2:23] instrumental version
16. En triumphant de Cruel Dueil [5:51] rondeau
17. Adyeu, quitte le demeurant [1:58] instrumental version
18. Je me complains piteusemente [2:22] ballade
19. Franc cuer gentil [1:49] instrumental version
20. Mon chier amy, qu’avés vous empensé ballade [6:41] ballade
Ensemble Gilles Binchois
Direction Dominique Vellard
Anne Delafosse — soprano
Anne-Marie Lablaude — soprano
Grace Newcombe — soprano, clavicymbalum
David Sagastume — alto
Achim Schulz — tenor
Dominique Vellard — tenor, lute
Anaïs Ramage — flute
VivaBiancaluna Biffi — medieval fiddle
Enregistré par Little Tribeca du 1er au 5 mars 2021 à l’Auditorium di Pigna (Corse)
Direction artistique, prise de son, montage et mastering : Hugo Scremin
Enregistré en 24-bits/96kHz
La création de ce programme a reçu le soutien de la Cité de la Voix de Vézelay
L’enregistrement a été réalisé dans
le cadre d’une résidence au CNCMVOCE à Pigna, Corse
English translation by Paul Willenbrock
Avec l’aide d’Anne-Marie Lablaude pour le français
ancien, et de Giovanni Cantarini pour l’ancien italien
Couverture : Le cœur d’amour épris, codex Vindobonensis 2597 (Wien, Österreichische Nationalbibliothek)
EVCD082 Little Tribeca ℗ Little Tribeca · Ensemble Gilles Binchois 2021 © Little Tribeca 2021
1 rue Paul Bert, 93500 Pantin [LC] 83780
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Dominique Vellard & Anne-Marie Lablaude
Dans les cours du xve siècle, comme celle des Malatesta ou celle
de Savoie, la musique est une compagne quotidienne ; la chanson est le
plaisir de tous les jours, elle véhicule la poésie,
exprime les passions, remédie à la douleur, sublime la
richesse des rapports amoureux. Comme art de société,
elle est du domaine de la convivialité, de la complicité,
de la connivence avec l’auditoire ; expression de la douceur,
elle charme l’oreille délicate par l’union intime de
la musique et de la poésie et fascine par la maîtrise et
le raffinement de ses moyens.
La chanson est peut-être la forme musicale où Dufay a pu
exprimer au mieux son immense talent. Écrites en français
et en italien (quelques-unes en latin), ses œuvres offrent une grande
diversité, ce qui permet d’appréhender la constante
évolution de l’esthétique du genre. Tout au long de
celleci, Dufay se place, parmi ses pairs, en maître absolu, par
la perfection de son écriture et l’intensité de son
expression. Quel qu’en soit le sujet, quelle qu’en soit la
forme (de mai, de nouvel an, de déploration, de
célébration, d’amour...), Dufay a fait de chacune
de ses 80 chansons une totale réussite, tant sur le plan de la
composition que sur celui de l’expression des sentiments,
toujours empreinte de lyrisme. Très jeune, il s’est nourri
de l’élan donné par le renouveau stylistique du
début du siècle, à l’instar de son
maître Nicolas Grenon à Cambrai. Il a ensuite
rencontré des pratiques qui ont inspiré son style : la
tradition anglaise, sans doute découverte lors du concile de
Constance, avec son idéal de douceur, et la musique italienne
dont certains aspects semblent avoir eu une forte influence sur lui (le
style des laudes par exemple). Dufay a fait son miel de toutes ces
esthétiques et a enrichi l’histoire de la musique
d’une œuvre magistrale qui dépasse les frontières
stylistiques et temporelles.
Paradoxalement ces chansons, destinées à
l’agrément des cours, ont été écrites
par un homme d’Église. En effet, Dufay, né à
Cambrai ou dans ses environs, entra dans le chœur de la
cathédrale de la ville en 1409. Nous ne savons pas si
c’était comme enfant ou adolescent car, s’il est
convenu d’établir 1400 comme l’année de sa
naissance, il est fort probable que celleci fut antérieure de
quelques années. En effet, dès 1413-1414, il fut
mentionné comme clerc dans cette même cathédrale.
Celle-ci était l’une des merveilles architecturales du
Moyen Âge, de même taille que celles de Paris et de
Chartres ; comme ces dernières, elle était
considérée comme un phare de la chrétienté.
Réputée pour les qualités musicales de son
répertoire et de ses chanteurs (seul le chant y était
pratiqué, aucun instrument n’était admis dans les
cérémonies, même à l’occasion des
processions et des jours de fête), la cathédrale de
Cambrai attirait les grands compositeurs aussi bien que les rois, ducs
et princes. Ceux-ci venaient recruter pour leur chapelle des enfants de
la maîtrise et, pour leur cour, les chanteurs
réputés qui y étaient formés.
Après 1414, il n’est plus fait mention de Dufay dans les
registres de la cathédrale. Il est fort probable qu’il
suivit Pierre d’Ailly, cardinal de Cambrai, au grand concile de
Constance (1414-1418). Là se côtoyèrent environ
18000 clercs de toute l’Europe ainsi qu’environ 1700
musiciens. C’est probablement à cette occasion que Dufay
entra en contact avec la musique anglaise et qu’il approcha la
famille Malatesta ainsi que le pape Martin V, nouvellement élu.
Sa vie se poursuivit en Italie, à la cour des Malatesta à
Rimini de 1420 à 1426. En 1428, docteur en droit canon de
l’Université de Bologne, il fut ordonné
prêtre et engagé comme chanteur à la chapelle de
Martin V puis d’Eugène IV à Rome. Il entra en 1434
au service d’Amédée VIII de Savoie tout en restant
proche de la chapelle papale, partageant ainsi son temps entre les deux
cours jusqu’à la fin de 1439 où il retourna
à Cambrai qui devint sa résidence principale. Dans les
années 1450, il fut de nouveau au service de la cour de Savoie
comme maître de chapelle. Fin 1458, il revint
définitivement à Cambrai.
Pendant sa carrière, Dufay a perçu des revenus
ecclésiastiques de différentes églises et
cathédrales (Bruxelles, Mons, Bruges, Cambrai, Versoix,
Lausanne...). À Cambrai, outre l’entretien des livres de
chant et l’enrichissement du répertoire de la
cathédrale (parfois avec ses propres compositions mais aussi
avec celles d’Ockeghem, Regis, Caron...), les tâches qui
lui incombaient étaient diverses : Maître des enfants du
chœur, des clefs du coffre, du trésor de la cathédrale,
officier du four et du vin, surveillant des travaux et responsable des
inventaires. Il est probable que la majorité de ses chansons a
été écrite dans les différentes cours
où il a servi, les périodes où il demeurait
à Cambrai lui laissant moins de temps pour la composition,
laquelle était principalement tournée vers la musique
liturgique.
Sa bibliothèque reflétait sa culture littéraire et
ses connaissances en théologie et en droit canon. Parmi les
livres de chant et les poètes latins, on trouvait aussi les
auteurs contemporains et le fameux Remède de fortune
de Guillaume de Machaut. Il mourut le 27 novembre 1474 après une
longue maladie. Ses funérailles furent dignes d’un prince
: 91 clercs de la cathédrale et 126 prêtres y
participèrent. On y chanta son Requiem
— malheureusement perdu — et les deux pièces
qu’il souhaitait que l’on donne à l’heure de
sa mort : l’hymne Magno salutis gaudio et son somptueux motet à quatre voix Ave Regina cœlorum. Il reçut ainsi les honneurs dus à l’immense musicien qu’il était.
• Édition d’Henrich Bessler CMM (Corpus Mensurabilis
Musicæ – 1) mise à jour par David Fallows.
• Pour ces notes de présentation, nous nous sommes
inspirés d’articles de Craig Wright et du livre que David
Fallows a consacré au compositeur.
[1] Par droit je puis bien complaindre et gemir
Dans ce rondeau, les deux voix inférieures (contretenors) servent de base à un canon aux deux voix supérieures. Les jeux rythmiques enrichissent le contrepoint : 6 minimes (croches) qui constituent le tempus
(la mesure) sont regroupées par 3 fois 2 ou 2 fois 3.
Les mélodies fleuries dans toutes les voix
génèrent une sonorité pleine et continuellement
mouvante.
[2] Douce dame
Rondeau conservé dans le splendide Chansonnier cordiforme, issu de la cour de Savoie. Les voix du cantus et du tenor, commencent chacune des trois grandes sections par des entrées en fugato
qui se rejoignent à la fin. Est-ce la langue italienne qui
inspire tout particulièrement Dufay ? La chanson est lumineuse,
mélange de grâce et de vitalité
[3] Belle, que vous ay je mesfait · instrumental
La version instrumentale de cette pièce souligne l’effet
saisissant produit par les trois voix écrites chacune avec un
signe de mesure différent (tempus perfectum 3/4, tempus imperfectum 2/4 et imperfectum maior 6/8), produisant ainsi des phrasés très individualisés.
[4] Les douleurs dont me prends tel somme
Ce rondeau tardif est construit sur un canon des voix
supérieures (ici chanté pour la première et
joué à la flûte pour la deuxième)
accompagné de deux concordans (dans des situations similaires, peut être appelé contretenor) comme dans Par droit je puis bien complaindre. La pièce, écrite dans la tonalité claire du mode lydien (mode de fa)
permet un contrepoint extrêmement ouvré,
n’hésitant pas à utiliser de très grands
sauts (surtout dans les voix concordans)
et agrémentant les lignes de subtils ornements. Le texte est
d’Anthoine de Cuise, membre de l’entourage du duc Charles
d’Orléans, avec lequel Guillaume Dufay fut en contact
autour de 1450.
[5] L’alta belleza
Cette ballata italienne, comme toutes les chansons du jeune Dufay, cisèle chaque vers du poème. Le cantus et le tenor
énoncent successivement chaque début de vers pour se
rejoindre à la fin. Les deux voix se cherchent et se provoquent
jusqu’à l’extrême du jeu rythmique sur «
d’amor s’enfiama più l’ardente peto ».
[6] Je ne suy plus tel que souloye
Dans ce petit rondeau, un contraste radical apparaît entre les
deux parties (A & B). Les trois phrases de A nous conduisent avec
souplesse de la sonorité de ré à celle de la dominante la.
B sonne comme un refrain, les trois voix chantant successivement la
même mélodie sur « et m'ont les dames refusé
» ; la dernière phrase mène à une cadence
sur sol.
[7] Adieu m’amour, adieu ma joye
Rondeau tardif dont le couple cantus-tenor
pourrait se suffire à lui-même tant la composition est
parfaite. Toutes les voix commencent ensemble au début du
poème, contrairement à tous les autres vers où
elles entrent décalées d’une brève (la
blanche). Dans la majorité des chansons de cette période,
chaque vers porte une phrase musicale plus longue que dans les
premières chansons de Dufay ; ainsi, le sentiment rythmique,
basé sur le tactus (la
pulsation) y est totalement différent. On notera la progression
mélodique de la chanson sur les trois premiers vers (constituant
un magnifique procédé rhétorique). À la
fin, sur « qu’il me semble que morir doye »,
l’accroissement rythmique soulignant le désarroi du
poète contraste avec le calme résigné du premier
vers, « Adieu m’amour ».
[8] He, compaignons, resvelons nous · instrumental
Rondeau à quatre voix issu du fameux manuscrit d’Oxford
(compilé à Venise vers 1436), lequel contient 45 des
chansons de Dufay. Les deux voix supérieures alternent des
passages cantabile avec des
sections plus ornées. Elles s’appuient sur les deux voix
graves qui se déploient sur un large ambitus en affirmant les
sonorités du sol dorien (mineur) et de sa dominante ré.
[9] Ce moys de may soyons lies et joyeux
Ce rondeau fait partie des 5 chansons composées avant 1440 pour
fêter le mois de mai (de même que 10 chansons sont
destinées à célébrer le jour de
l’an). Dufay s’écarte, dans ses chansons de
circonstance, de la tradition de l’idéal de l’amour
courtois. Bien plus importantes en nombre chez Dufay que dans la
production de ses contemporains, celles-ci révèlent-elles
le caractère jovial et convivial du compositeur ? «
Chantons, dansons et menons chiere lye …Dufay vous en prye !
»
[10] Estrinez moy, je vous estrineray
Ce rondeau du premier Dufay est très original car il comporte un
dialogue amoureux. L’homme, qui est chanté par la voix
supérieure, demande pour ses étrennes l’amour de sa
belle (voix chantée par le tenor !) qui saura le réconforter.
[11] Ce jour le doibt, aussi fait la saison
Cette ballade pourrait avoir été écrite à Laon entre 1424 et 1426, tout comme le rondeau Adieu ces bons vins de Lannoy. L’élégante mélodie se développe sur deux lignes (tenor et contretenor)
d’un style instrumental très simple qui convient
particulièrement à un jeu polyphonique à la harpe,
au luth ou, dans le cas présent, au clavicymbalum. La prosodie,
comme celle de Binchois, est admirablement inscrite dans le flux
mélodique.
[12] Ne je ne dors ne je ne veille
Ce rondeau contraste nettement avec la chanson
précédente, tant pour la poésie que pour sa mise
en musique. Dufay, à ce stade de sa vie, participe à une
évolution stylistique majeure ; le contrepoint est plus dense,
la poésie plus intense. Ce rondeau comporte cinq longues phrases
sur une tonique de do, les deux premières avec la tierce majeure mi, les trois dernières avec la tierce mineure, mi bémol. Le premier bémol arrive sur soupirer. Le dernier vers « que mort contre moy se resveille » utilise successivement le mi bémol et bécarre, le fa naturel et dièse, le la bémol et bécarre, le si bémol et bécarre dans les 7 dernières mesures !
[13] Resvelons nous
De nouveau une très courte chanson de mai, notée dans le
manuscrit d’Oxford, basée sur un canon à la quinte.
Le matériel musical vient directement du motet O Sancte Sebastianæ,
daté de 1421 ou 1422 ; en effet, que la fonction d’une
pièce soit liturgique ou profane, les décisions
compositionnelles ne sont déterminées que par la
structure du texte et la forme choisie.
[14] Pour l’amour de ma doulce amye
Ce délicieux rondeau à trois voix – du manuscrit d’Oxford – est écrit en lydien (mode de fa). La prosodie de cette chanson d’amour est admirable et les phrases du cantus sont ponctuées de longues vocalises d’une grande tendresse.
[15] Mille bonjours je vous presente · instrumental
Nous avons choisi d’interpréter aux instruments cette
chanson pour « le jour de l'annee nouvelle » (dans
l’un des manuscrits, le texte est un motet à la Vierge).
La composition utilise les mêmes possibilités de couleurs
que Ne je ne dors, en variant les altérations sur le mi, le fa, le la et le si.
[16] En triomphant de Cruel Dueil
Dans ce rondeau, Dufay déplore la mort de son ami Binchois, le
20 septembre 1460, tout comme le fit son collègue Ockeghem.
« Triste plaisir » et « Dueil angoisseux » sont
les incipit de chansons de Binchois. Écrit en mode dorien (mode
de ré), ce rondeau-déploration est l’un des sommets du compositeur. Toutes les phrases du cantus
se développent du médium vers l’aigu pour
redescendre en fin de vers. La dernière phrase part quant
à elle de l’aigu, et exploite rythmiquement le mode
jusqu’à son extrême partie grave. Les voix de tenor et de contra,
très riches, elles aussi, participent de cette sonorité
luxuriante. La plénitude sonore exclut pourtant le pathos, Dufay
rend hommage à son illustre collègue en
réaffirmant le pouvoir consolateur de la musique.
[17] Adyeu, quitte le demeurant · instrumental
Nous avons choisi d’interpréter ce rondeau tardif –
dont le texte est perdu – au clavicymbalum et au luth.
Écrite en phrygien (mode de mi),
la mélodie très conjointe se déploie sur un
ambitus limité à une octave. Les quatre sections (les
vers de la chanson) exploitent les possibilités expressives de
ce mode peu utilisé dans la polyphonie du xve siècle.
[18] Je me complains piteusement
Composée le 12 juillet 1425, cette ballade est un joyau unique
et incomparable. Utilisant le caractère spécifique du
mode de mi, les trois voix
évoluent dans le même ambitus. Les deux voix
supérieures forment déjà un contrepoint qui se
suffit à lui-même, la troisième vient
compléter la sonorité. L’individualité des
voix sur le plan rythmique donne une sensation de fluidité et de
liberté. Les imitations, l’alternance
d’entrées successives et de passages homophoniques, la
longue vocalise commune à la fin des parties A et B, toute la
richesse et la complexité de l’écriture
n’empêchent en rien l’auditeur d’être
saisi par la grâce de cette courte ballade.
[19] Franc cuer gentil · instrumental
Ce rondeau a été mis en tablature dans la fameuse collection du Livre d’orgue de Buxheim (Buxheimer Orgelbuch).
L’adaptation, contrairement à de nombreuses pièces
du recueil, est peu ornementée, laissant ainsi la mélodie
se développer naturellement, ornée seulement de quelques
formules qui conviennent aux instruments.
[20] Mon chier amy
Cette ballade a sans doute été composée en 1427,
pour la mort de Pandolfo Malatesta. Composée en dorien (mode de ré),
la déploration est d’une grande intensité. Le
mélange d’intériorité, de
piété et de douleur contenue est une grande leçon
venant d’un musicien qui n’a pas encore 30 ans.
Dominique Vellard & Anne-Marie Lablaude
In the courts of the 15th century, such as those of the Houses of Malatesta or of Savoy, music was a constant companion; the chanson
was their daily pleasure, it was a vehicle for poetry, expressed
passions, was a remedy for pain, and sublimated the richness of amorous
relationships. Being a social art, it encouraged conviviality,
complicity, and connivance with the audience; expressing sweetness, the
chanson charmed the refined ear with its intimate union of music and
poetry, and fascinated listeners with its mastery and the refinement of
its means.
The chanson was perhaps the musical form in which Dufay best expressed
his immense talent. These works, written in French and Italian (some in
Latin) show great diversity, enabling us to appreciate the constant
evolution of the aesthetic of the genre. Throughout this evolution,
Dufay was always seen as an absolute master among his peers, owing to
the perfection of his writing and its intense expressivity. Whatever
the subject, whatever the form (chansons for May Day, for the New Year,
laments, celebratory or amorous chansons…), each of
Dufay’s 80 chansons is masterfully crafted, as much in terms of
musical composition as of expression of the emotions, and always
characterized by great lyricism. From his earliest years he thrived on
the impetus created by the stylistic revitalization that occurred at
the beginning of the century, with figures like his master Nicolas
Grenon in Cambrai. He then encountered new practices that brought new
inspiration to his musical language: the English tradition with its
ideal of sweetness, which he doubtless discovered while at the Council
of Constance; Italian music, certain aspects of which seem to have had
a strong influence on him (the style of lauds for example). Dufay
benefited from all these different aesthetic movements and enriched the
history of music with a masterly oeuvre that went far beyond the
stylistic boundaries of the time.
Paradoxically these chansons, intended for the delectation of courts,
were written by a man of the Church. Indeed Dufay, born in or around
Cambrai, entered the choir of its cathedral in 1409. We do not know if
this was as a child or as an adolescent, since although the date of his
birth is generally said to be 1400, it is highly likely that he was
actually born a few years earlier. In fact we find him mentioned as a
cleric there by 1413-1414. Cambrai cathedral was one of the great
architectural wonders of the Middle Ages, equal in size to the great
cathedrals of Paris and Chartres; like them it was regarded as a beacon
of Christianity. With its reputation for the musical qualities of its
repertoire and its singers (only singing was practiced in Cambrai, as
no musical instrument was allowed in religious ceremonies there, not
even for processions and feasts of the Church), Cambrai cathedral
attracted the best composers of the day, as well as kings, dukes and
princes; they came specifically to recruit choirboys for their chapels,
and for their courts the famous singers who had been trained there.
After 1414, there is no further mention of Dufay in the cathedral
registers. He probably followed Pierre d’Ailly, cardinal of
Cambrai, to the great Council of Constance (1414-1418). Around 18000
clerics from all over Europe convened there, as well as about 1700
musicians. It is probably on this occasion that Dufay came into contact
with English music and that he approached the Malatesta family for
employment, as well as the newly elected Pope Martin V.
His life continued in Italy, at the court of the Malatesta family in
Rimini from 1420 to 1426. In 1428, with a doctorate in canon law from
the University of Bologna, he was ordained priest and taken on as
singer in the chapel of Pope Martin V, and later Eugene IV, in Rome. In
1434 he entered the service of Amadeus VIII, Duke of Savoy, while
remaining attached to the Papal Chapel, thus dividing his time between
the two courts until the end of 1439 when he returned to Cambrai, which
then became his principal home. In the 1450s, we find him back in the
service of the Court of Savoy as maître de chapelle.
At the end of 1458, he returned to Cambrai for good. Throughout his
career Dufay was in receipt of ecclesiastical stipends from different
churches and cathedrals (Brussels, Mons, Bruges, Cambrai, Versoix,
Lausanne…). In Cambrai, in addition to taking care of the
choirbooks and enriching the repertoire of the cathedral (sometimes
with his own compositions but also with those of Ockeghem, Regis,
Caron…), his various tasks included: Master to the choirboys,
Master of the keys of the chest and of the cathedral’s treasury,
officer of the oven and of the wine cellar, supervisor of works and
controller of inventories. It is likely that the majority of his
chansons were written at the different courts at which he served, as he
would have had little time for such composition during the periods when
he was living in Cambrai, where his attention would have been focused
mainly on liturgical music. His library reflects the degree of his
literary cultivation and his erudition in theology and canon law. Among
his volumes of music and Latin poets, contemporaneous authors are also
to be found, as well as the famous Remède de fortune
by Guillaume de Machaut. He died on the 27th of November 1474 after a
long illness. His funeral ceremony was worthy of a prince: 91 clerics
of the cathedral and 126 priests participated. His Requiem was sung — unfortunately it is lost — and the two pieces that he had asked to have sung as he was dying: the hymn Magno salutis gaudio and the sumptuous four-part motet Ave Regina cœlorum. Thus he received the honours due to the immense musician that he was.
• Edition Henrich Bessler CMM (Corpus Mensurabilis Musicæ – 1) updated by David Fallows.
• For these presentation notes we have taken inspiration from
articles by Craig Wright and the book that David Fallows devoted to the
composer.
[1] I have every right to complain and groan
In this rondeau, the two lower voices (contratenor)
serve as the basis of a canon for the two upper voices. The rhythmic
interplay enriches the counterpoint: 6 minims (equivalent to modern
quavers/eighth notes) that make up the tempus (the bar) are grouped as 3 times 2, or 2 times 3. The florid melodic lines in all the voices give this chanson a rich sound and continual movement.
[2] Noble lady
This rondeau is conserved in the splendid (heart-shaped) Chansonnier cordiforme from the Court of Savoy. The voices of the cantus and tenor begin each of the three main sections with fugato
entries that come together at the end. Was it the Italian language that
gave Dufay such inspiration? The chanson is luminous, a mix of grace
and vitality.
[3] Fair one, what wrong have I done you · instrumental
The instrumental version of this piece emphasizes the striking effect
created by the three voices each written with a different time
signature (tempus perfectum 3/4, tempus imperfectum 2/4 et imperfectum maior 6/8), giving each line its own particular phrasing.
[4] The pains which so weigh me down
This rondeau, written towards
the end of Dufay’s life, is built on a canon in the upper voices
(on this recording the first is sung and the second played on the
flute) accompanied by two concordans (which in similar situations might be called contratenor) as in Par droit je puis bien complaindre.
The piece, written in the bright tonality of the Lydian mode (F mode)
offers a highly elaborate counterpoint which is not afraid of using
large intervallic leaps (particularly in the concordans voices)
and embellishing the lines with subtle ornaments. The text is by
Anthoine de Cuise who was in the entourage of Duke Charles
d’Orléans, with whom Guillaume Dufay was in contact in the
1450s.
[5] L’alta belleza
This Italian ballata, like all the chansons dating from Dufay’s youth, finely sculpts each verse of the poem. The cantsu and the tenor
enounce the beginning of each verse in turn before coming together at
the end. The two voices seek and provoke each other to extremes of
rhythmic interplay at the words “d’amor s’enfiama più l’ardente peto”.
[6] I am no longer as I am used to being
In this little rondeau the two
parts (A & B) are radically contrasted. In the A section the
musical phrases subtly lead us from the sound-world of D to that of the
dominant A. The B section sounds like a refrain, the three voices
successively singing the same melody at “et m’ont les dames refuse” ; the last phrase leads to a cadence in G.
[7] Adieu my love, adieu my joy
In this late rondeau the
cantus-tenor duo could suffice as they are, so perfect is the
composition. All the voices start together at the beginning of the
poem, unlike all the other verses in which they enter a breve
(minim/half-note) apart from each other. As with most of the chansons
of this period, each verse is made up of musical phrases that are
longer than those of Dufay’s earliest chansons, and the rhythmic
feel, based on the tactus
(the pulse), is totally different. The melodic progression of the song
in the first three verses is particularly noteworthy (a magnificent
rhetorical process). At the end of the chanson, “qu’il me semble que morir doye”,
the rhythmic expansion that accentuates the poet’s disarray
contrasts with the resigned calm of the first verse “Adieu m’amour”.
[8] Hey friends, let’s awake · instrumental
A rondeau for four voices that
is to be found in the famous Oxford Manuscript (compiled in Venice
around 1436), which contains 45 of Dufay’s chansons. The two
upper voices alternate cantabile
sections with more ornate passages. They are supported by two
wide-ranging low voices, which establish the sonorities of G Dorian
(minor) and its dominant, D.
[9] This month of May let us be merry and joyful
This rondeau is one of the
five that were composed before 1440 to celebrate the month of May (just
as he also wrote 10 chansons to celebrate New Year’s Day). In
these occasional chansons Dufay moves away from the tradition of the
ideal of courtly love. Does the fact that Dufay produced many more of
these celebratory chansons than his contemporaries suggest that the
composer had a jovial, convivial character? “Chantons, dansons et menons chiere lye …Dufay vous en prye !” (Let us sing, dance and feast… Dufay beseeches [invites?] you!)
[10] Give me a gift and I’ll give you a gift
This rondeau, one of
Dufay’s earliest works, is highly original as it is a dialogue
between two lovers. As his New Year’s gift, the man, who is sung
by the higher voice, asks for the love of his beloved (sung by the tenor!), in the hope that it would bring him comfort.
[11] This day demands it, so does the season
This ballade may have been written in Laon between 1424 and 1426, as well as the rondeau Adieu ces bons vins de Lannoy. The elegant melody is developed on two vocal lines (tenor and contratenor)
in a very simple instrumental style that is particularly suited to
polyphonic performance on the harp, the lute or, as in the present
case, the clavicymbalum. The word setting, like that of Binchois,
admirably suits the flow of the melody.
[12] I am neither asleep nor am I awake
This rondeau is in clear
contrast with the preceding chanson, as much for the poem as for the
way it is set to music. At this point in his life Dufay was playing his
part in a major stylistic development; the counterpoint is denser, the
poetry more intense. This rondeau
is made up of five long phrases on a tonic of C, the first two with the
major third, E, the last three with the minor third, E flat. The first
flat comes on the word soupirer (to sigh). The last line “que mort contre moy se resveille”
uses successively E flat and E natural, F natural and F sharp, A flat
and A natural, B flat and B natural, all within the last 7 bars!
[13] Let us awake
Another chanson for the month of May, a very short one to be found in
the Oxford Manuscript; it is based on a canon at the fifth. The musical
material comes directly from Dufay’s own motet O Sancte Sebastianæ
which dates from 1421 or 1422; indeed, whether a piece was for
liturgical or secular use, Dufay’s compositional
choices were purely determined by the structure of the text and the
form chosen to set it.
[14] For the love of my sweet lady
This delightful rondeau for
three voices – from the Oxford Manuscript – is written in
the Lydian mode (in F). The word setting in this love song is admirable
and the phrases of the cantus are punctuated by long vocalises of a particularly tender nature.
[15] A thousand greetings I give you · instrumental
We have opted for an instrumental performance of this chanson for New Year’s Day “le jour de l’annee nouvelle” (in one of the manuscripts, the text is a motet to the Virgin). The piece uses the same colours as Ne je ne dors, varying accidentals on the notes of E, F, A and B.
[16] To triumph over Cruel Grief
In this rondeau, Dufay laments the death of his friend Binchois, the 20th of September 1460, just as his colleague Ockeghem also did. “Triste Plaisir” and “Dueil angoisseux”
are the incipits of chansons by Binchois. This rondeau-lament, written
in the Dorian mode (of D), is one of the summits of the
composer’s art. All the phrases in the cantus
part develop upwards from the middle to the upper register, only to go
down again at the end of the verse. The last phrase however starts from
the top and fully exploits the rhythmic possibilities of the lowest
part of the mode. The tenor and contra
parts, which are also very rich, contribute to the luxurious sonority
of the piece. This richness of sound does not however descend into
pathos; Dufay pays homage to his illustrious colleague by reaffirming
the consoling power of music.
[17] Adyeu, quitte le demeurant · instrumental
We have chosen to perform this late rondeau – of which the text
is lost – on the clavicymbalum and lute. The very compact melody,
in the Phrygian mode (the mode of E), ranges over no more than an
octave. The four sections (verses of the chanson) use the expressive
possibilities of this mode, which was not used very often in
15th-century polyphony.
[18] I complain piteously
This ballade, written on the 12th of July 1425 is a unique,
incomparable jewel. It uses the very specific character of the mode of
E, the three vocal lines all developing within the same range. The two
upper voices already form a counterpoint that is sufficient in itself,
and the third completes the sonority of the piece. The individuality of
the voices from a rhythmic point of view gives a sensation of fluidity
and freedom. The imitations, the alternation of successive entries and
of homophonic passages, the long vocalise, common to all the voices at
the end of the A and B sections, all the richness and complexity of
writing, none of these prevent the listener from being impressed by the
grace of this short ballade
[19] Frank and noble heart · instrumental
This rondeau was put into tablature in the famous collection The Buxheimer Organbook (Buxheimer Orgelbuch).
The adaptation, unlike many of the pieces in the collection, has little
ornamentation, thus allowing the melody to develop naturally; the only
ornaments it contains are a few formulae that are particularly suitable
for instrumental performance.
[20] My dear friend
This ballade was doubtless composed in 1427 on the death of Pandolfo
Malatesta. The lament, written in the Dorian mode (of D), is
particularly intense. The mixture of interiority, piety, and contained
sadness is a masterful lesson coming from a musician who had not yet
reached 30 years of age.