Aler m'en veus / Oxyton





Son an ero
2014







Aler m’en veus en strangne partie
pus que piete est endormie
en vos pucelle pour qui je mour
por qui launguis et nuit et jour
Chcę pojechać do ziemi nieznanej
Bo litość zasnęła
W Pani, dziewico, dla której umieram
I tęsknię dzień i noc







1. Pavane pour le retour de Pologne  [2:54]
Recueil de plusieurs vieux airs et ballets. Recueillis par Philidor l’Aîné en 1690
2. Gaillarde pour le retour de Pologne  [1:37]   Michel Gendre
AdA : flaviol et tambour | MG : guitare renaissance | EH : basson renaissance | EP : tambour


3. Psallat chorus celestium  [2:26]   cc 2
Codex Calixtinus, Espagne vers 1140. Hymne de Fulbert de Chartres (vers 960-1028)
EH et EP : chant | AdA : chant et vielle à roue


4. Aler m’en veus  [5:36]
Texte et musique de Jean Cigogne (Liège vers 1330-Padoue 1412)
EH et EP : chant | AdA : flûte à bec ténor | MG : luth médiéval


5. Chanterai por mon corage  [2:24]
Chansonnier du Roi. Chanson de croisade de Guiot de Dijon, Bourgogne début XIIIe siècle
EH : chant


6. Dal bel chastel  [2:33]
Codex Rossi, Italie XIVe siècle
EH et EP : chant | MG : luth médiéval | AdA : tambourin


7. Der Leiermann (Le joueur de vielle)  [3:52]   Winterreise (Voyage d’hiver)
Musique de Franz Peter Schubert (Vienne 1797-1828). Poème de Wilhelm Müller (Dessau 1794-1827)
AdA : chant et vielle à roue | MG : guitare classique | EH : clarinette


8. La belle voyageuse  [4:28]   légende irlandaise
Poème de Thomas Gounet (1801-1869) d'après Thomas Moore (Dublin 1779-Sloperton 1852)
Musique d'Hector Berlioz (La Côte-Saint-André 1803-Paris 1869)
EH : chant | MG : guitare classique


9. Little wing  [4:05]
Jimi Hendrix (Seattle 1942-Londres 1970)
EP : chant | AdA : vielle à roue | MG : archiluth | EH : clarinette


10. Camini por altas torres  [2:48]   Traditionnel séfarade
EP : chant


11. O sia tranquillo il mare  [4:04]
8e livre de madrigaux, Venise, 1638. Musique de Claudio Monterverdi (Crémone 1567-Venise 1643)
EP : chant | EH : chant | MG : archiluth


12. Prélude à Léandre  [1:19]   Michel Gendre
13. Lorsque Léandre amoureux  [3:56]
Airs de différents auteurs mis en tablature de luth, 1602 et Airs galants à 4 et 5 parties et pour voix et luth, 1608
Poème de Nicolas Rapin (Fontenay-le-Comte 1535-Poitiers 1608)
Musique de Pierre Guédron (Châteaudun vers 1566-Paris vers 1620)
EH, EP, AdA : chant | MG : archiluth


14. Fatigada navecilla  [4:54]
Cancionero de la Sablonara, Espagne, XVIIe siècle. Musique de Mateo Romero (vers 1575–1647)
AdA : chant et tambour sur cadre | MG : guitare baroque | EH et EP chant


15. Del gran golfe de mar  [7:33]
Chansonnier du Roi. Canso de Gaucelm Faidit (Uzerche 1180-vers 1220)
Musique d’après la dansa Amors m’ard con fuoc amb flama, anonyme
EP : chant | AdA : flûte bansuri | MG : oud


16. Pos de chantar  [3:51]
Chansonnier du Roi. Canso de Guillaume de Poitiers (vers 1071-1126)
sur l'air de A l’entrada del temps florit, anonyme
AdA : chant et vielle à roue


17. Por dereito  [4:52]   CSM 175
Cantiga de Santa Maria 175. Espagne, XIIIe siècle
EP et EH: chant | MG : oud


18. La grande chanson  [3:55]
Traditionnel. Les chansons des pèlerins de Saint-Jacques
Recueilli par Camille Daux, Montauban, 1899
EP : chant et tambour | AdA : flûte à bec ténor et basson renaissance | EH : basson renaissance | MG : guitare renaissance




- Les transcriptions et les arrangements ont été réalisés par l’ensemble -




Augusto de Alencar (AdA) : chant, basson, flaviol, flûtes, percussions et vielle à roue
Michel Gendre (MG) : luths, guitares, oud
Emmanuelle Huteau (EH) : chant, basson et clarinette
Elsa Papatanasios (EP) : chant, percussions










Départ
Nous avons commencé par « de savantes gammes et des arpè-è-ges » dans des écoles qui avaient pour idéal la musique savante du XIXe siècle vue par les canons du XXe, le tout en écoutant du rock et de la pop. Puis la découverte du baroque, de la Renaissance, du Moyen-Age, et des musiques traditionnelles de nos contrées. Cette quête n'est pas tout à fait linéaire d'un point de vue chronologique, et nos premiers regards sur la musique écrite étaient formés par un héritage conservateur qui voyait un âge d’or dans la musique du XIXe tout en jouant des instruments considérés comme « améliorés ». Premier virage.

Boussole
L'idée était de partir de musiques que nous avions croisées depuis que nous jouions, sans nous censurer. Le Moyen-Age a été finalement notre lieu de rencontre à tous les quatre. Oxyton s'est constitué pour illustrer une réflexion sur les pèlerinages comme lieux d'échanges culturels, avec notre ami Jean-Pierre Longeat, abbé de Ligugé, dans le cadre d'un colloque organisé par la Région Poitou-Charentes. Depuis nous avons exploré bien des musiques en rapport avec ce thème avant d'en arriver à l'étape plus personnelle de ce disque.
Le défi était d'oser porter un regard sur des musiques dont nous ne sommes pas, affreux mot, « spécialistes ». Nouvelle étape du voyage : oublier ce code de légitimité des musiciens-lecteurs-chercheurs.

Sources
Les pièces de l’époque médiévale sont presque toutes consignées dans des chansonniers conservés à la Bibliothèque Nationale de France ou à la Bibliothèque Vaticane, textes seulement ou textes et musiques. Quand la musique venait à manquer nous avons pris des mélodies dans d'autres chansonniers — pratique toujours vivante dans les musiques traditionnelles où les musiques sont souvent interchangeables pour un même texte. La Pavane pour le retour de Pologne a été recueillie en 1690 par Philidor, bibliothécaire de Louis XIV, dans des manuscrits anciens et aujourd’hui disparus. Les deux versions de Camini por altas torres et de La grande chanson, appartenant toutes deux à la littérature orale, ont été collectée fin XIXe. Les sources les plus complètes nous sont parvenues par le biais d’éditions musicales. Pour la chanson de Hendrix, nous avons travaillé « à l’oreille ».

Langues
Notre répertoire vient du monde lettré de l’Ouest de l’Europe et utilise de nombreuses langues : oc, oïl, moyen-français, vénitien, italien, judéo-espagnol, castillan, gallaïco-portugais, allemand, anglais.

Arrangements
Ce disque a été l’occasion pour nous d’explorer de nombreux types de jeu, d’accompagnements, d‘arrangements, d’explorer les codes propres à chaque répertoire :
- Pour les chants de troubadours, trouvères ou Por dereito nous avons choisi de jouer avec des bourdons, moyen d'accompagnement universel, et de conserver un univers monodique avec peu d'interventions de contrechants ou contrepoints.
- Dans Aler m’en veus nous avons doublé chaque voix avec un instrument.
- Pour Lorsque Léandre amoureux, nos avons enchaîné deux versions de la chanson : une pour voix et luth, jouée comme suggéré par le compositeur, et une arrangée à partir de la version à cinq voix.
- Nous avons transcrit pour voix et guitare La belle voyageuse de Berlioz originellement écrite pour voix et piano (Berlioz était guitariste). De même, petit clin d’œil au joueur de vielle (Der Leiermann) du Voyage d'hiver de Schubert avec réarrangement de la pièce pour lui redonner une veine plus populaire, plus proche du salon d’amateurs que des enregistrements mythiques.
- Pour Hendrix : archiluth, vieille à roue et clarinette. C'est sans doute la cohabitation la plus difficile pour la justesse à cause des accords très différents des instruments. Le tempérament dit « égal » du piano a un peu éludé le problème ces dernières décennies en divisant la gamme en parts aussi égales qu'irrespectueuses des harmonies naturelles. Mais qui veut faire sonner un instrument ancien sans lui ôter ses spécificités tâchera de garder les notes fortes et les notes faibles, les tonalités qui sonnent clair et les plus « bleues » ou injouables.

Moralle (ainsi qu’on l’orthographiait parfois quand on ne se souciait pas de normalisation)
A chaque univers ses codes et le pari de ce disque est d'être une véritable invitation au voyage par les lettres, les mélodies, les sons ou les manières de jouer.

« Au rebours, je pérégrine très saoul de nos façons, non pour chercher des Gascons en Sicile (j'en ai assez laissé au logis) : je cherche des Grecs plutôt, et des Persans : j'accointe ceux-là, je les considère : c'est là où je me prête et où je m'emploie. Et qui plus est, il me semble que je n'ai rencontré guère de manières qui ne vaillent les nôtres. » Michel de Montaigne, De la vanité, Livre III des Essais.

OXYTON

NB : Du fait de la multiplicité des sources, certains textes du livret peuvent présenter de légères différences avec les chants.










AUGUSTO DE ALENCAR

chemin vie  |  mer horizon  |  sentier des pas  |  musique présence  |  route essentiel  |  marche être  |  danse mouvement

« La musique : une façon d’aller ailleurs. »

« Partir pour aller là bas, vers soi. Je m’en irai piéton jusqu’à la mer, où je prendrai le plus simple des navires. J’emporte ce collier que l’on m’a offert et comme livre un carnet en papier de riz pour faire écrire les personnes que je rencontre. Sur la route je chante les musiques que m'offrent les contrées que je traverse. »

Cheminement artistique : Au Brésil, il étudie les musiques de la Renaissance et de l'époque baroque en pratiquant les flûtes à bec. Arrivé en France, il rencontre la musique traditionnelle de Vendée, pour laquelle il a appris la vielle à roue et la cornemuse. Ici il joue souvent la musique de là-bas, ce qui fait qu'il pratique la musique brésilienne depuis qu'il vit en France... alors qu'il avait appris la musique ancienne d’Europe au Brésil !


MICHEL GENDRE

chemin de terre  |  mer Méditerranée  |  sentier escarpé  |  musique ancienne  |  route vers la Pologne  |  marche harmonique  |  danse gaillarde

« La musique comme moyen de recherche et
de reconstitution d’un monde perdu. »


« Partir, pour aller autre part, l’essentiel étant le voyage en lui même. A pied, en voiture ou en avion suivant la distance. J’emporte une carte bancaire et une Bible ou un roman médiéval. Sur la route je chante Margot labourez les vignes ou Ô Madame perds-je mon temps, chansons à danser de la Renaissance éditées par Adrien Leroy. »

Cheminement artistique : Michel découvre la musique grâce à la flûte à bec au collège ! En sixième le professeur le repère et lui recommande d’intégrer l’harmonie municipale à la clarinette. Vers quinze ans il découvre la guitare auprès d’un copain : à partir de cet instant cela sera un jeu de vases communicants entre études et musique, la musique finissant par tout « phagocyter ». Commence alors le voyage dans le temps : de la guitare classique vers le luth pour la musique de la Renaissance, puis le luth médiéval, et enfin le oud pour les musique de l’Espagne médiévale. Cela se terminera peut être, dit Michel, par la musique de Cromagnon, en tapant sur des arbres ou au son des arcs !


EMMANUELLE HUTEAU

chemin dans la verdure  |  mer vague  |  sentier caillouteux et ensoleillé  |  musique abysse  |  route terre  |  marche respirer  |  danse joie

« La musique : un espace commun, une zone tampon, un lieu où se croisent les fils qui vont vers les autres. »

« Peu importe la destination pourvu qu’il y ait un chemin à parcourir à pied. J’emporte du papier et des crayons, et comme livre Les mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar. Sur la route je chante La complainte du roi Renaud arrangée par Déodat de Séverac. »

Cheminement artistique : Au commencement était la clarinette (et l'harmonie), puis le chant, d’abord choral, ensuite en petite bande, et enfin seule ! Assez vite aussi la découverte des instruments à anches doubles et particulièrement du basson : plaisir d’apprendre à se servir de l’instrument autant que de découvrir l’aspect technique de la facture. Et pour chacun de ces instruments quelques uns des répertoires qui leur sont associés.


ELSA PAPATANASIOS

chemin voie romaine  |  mer vague mélancolie  |  sentier forêt de la Joux  |  musique macrocosme  |  route de la soie  |  marche gorge de Guara  |  danse saltarello

« Le chant pour fouiller, inlassablement, les fondations des cultures et des musiques anciennes »

« Partir pour la Crète, accompagnée d’un âne tirant une calèche. J’emporte une canne sculptée dans un cep de vigne, comme livre Lamentations de la vieille femme de Beare (texte anonyme irlandais du VIIIe siècle). Sur la route je chante La vendetta è un dolce affetto de Barbara Strozzi. »

Cheminement artistique : L’intérêt d’Elsa pour le chant est né au cours de ses études d’archéologie, domaine qui l’entraîne tout naturellement sur la voie de la musique médiévale. Elle étudie d'abord le chant grégorien, ce qui continue à aiguiser sa passion pour les origines — de l’humanité, de l’art... Elle tente maintenant d’explorer l’héritage des musiques européennes et emprunte les ponts qui relient les premières polyphonies aux musiques d’aujourd’hui.










Nous tenons à remercier tout particulièrement Dom Jean-Pierre Longeat pour l'étincelle initiale pour l'ensemble et pour ses encouragements à poursuivre l'aventure, Caroline Pintoux, « oreilles extérieures » et fée-marraine de ce projet, Mayliss Balestic, Alberta Calcaterra, Alice Julien-Laferrière, Jacques Rancière, Gaël Ruillet, Antoine Hervé, la paroisse de Saint-Porchaire, les Soeurs de Salvert, Henri Ménard et les habitants de Nouaillé-Maupertuis pour leur accueil et leur gentillesse, ainsi que la chouette de l’abbaye Saint-Junien, témoin de nos travaux nocturnes. Nous remercions également toutes les oreilles venues écouter les mixages et les bibliothécaires qui nous ont aidés pour les textes.


Prise de son, mixage et montage : Augusto de Alencar.

Disque enregistré à la chapelle de Salvert de Migné-Auxances, à l’église de Nouaillé-Maupertuis et à l’église Saint-Porchaire de Poitiers, dans la Vienne, entre avril 2012 et janvier 2014.

Photos de couverture : Annette Bozorgan.
Photos du livret : Augusto de Alencar et Marie-Laure Bourgeois.
Traductions des textes du livret : Edouard Bueno, Mathilde Horcholle, Oxyton.
Biographies : Etienne de Kergariou.
Relecture et corrections : Marie-Laure Bourgeois, Edouard Bueno, Susanna Buffa, Mathilde Horcholle, Håvard Skaadel.
Création graphique et mise en page
: Emmanuelle Huteau.


Editions Son An Ero, 2014
Emmanuelle Huteau, Alban Moraud & Camille Rancière, éditeurs.
Association Son an ero, Mairie, 1 hent Lokireg, 29620 Guimaëc
www.petitfestival.fr




« J'ai pris la décision de partir. Ah si je pouvais ne pas m'emmener ! »
Andé Gide, Les faux-monnayeurs.


« Combien de fois, pendant cette triste nuit en chemin de fer, ne me suis-je pas répété : Imbécile ! pourquoi es-tu parti ? il fallait rester. »
Hector Berlioz, Mémoires.