La chanson d'ami / Ensemble Perceval
Chansons de femme · XIIe et XIIIe siècles





medieval.org
Arion 68290
1994







1. Molt m'abellist quant je voi revenir    [2:41]
M • Paris B.N. 844 Manuscrit du Roi | R 1451 — Maroie de DIERGNAU [de Lille]
chant, harpe, vièle


2. Cuidoient li losengier  [6:55]
a • Rome, Vatican Reg. 1490 (texte) & K • Paris, Ars. 5198, Chansonnier de l'Arsenal (musique)
R 1287 — Gillebert de BERNEVILLE
chant, luth, flûte, rebec


3. Jherusalem, grant damage me fais  [5:14]
texte: M • Paris B.N. 844 Manuscrit du Roi | R 1646 — anonyme
musique: K • Chansonnier de l'Arsenal | R 319 — Robert de Reims, Plaindre m'estuet
chant, luth arabe

4. Vous ne savez que me fist  [4:48]
i • Paris BN 12483 (chansons pieuses) | R 1646 — anonyme (unicum)
chant, orgue, vièle


5. Plaine d'ire et de desconfort  [6:24]
texte: U • Paris B.N. 20050, Chansonnier de Saint-Germain | R 1934 — anonyme (unicum)
musique
: Bernard de Ventadour, Quan vei l'alauzetta mover
chant, harpe, flûte, vièle

6. Por coi me bait mes maris  [2:10]
texte: I • Oxford Bod. Douce 308 | R 1564 — anonyme
chant, chiffonie


7. Soufres, maris, et si ne vous anuit   [2:18]
texte: a (add.) • Rome, Vatican Reg. 1490 | Boogaard 193 — anonyme
chant, chiffonie, luth


8. Cant voi l'aube du jour venir  [6:20]
texte: C • Bern, Stadtbibliothek 389 | R 1481 — Gace BRULÉ (unicum)
musique: j • Paris B.N. 21677, Fragment Aubry (chansons pieuses)

R 1604a — anonyme, Amour ou trop tart me sui pris
chant, harpe, flûte, vièle

9. L'on dit qu'amors est dolce chose  [4:51]
U • Paris B.N. 20050, Chansonnier de Saint-Germain | R 1937 — anonyme (unicum pour la musique)
chant, luth, rebec, flûte

10. Silz a cui je suis amie  [2:53]
I • Oxford Bod. Douce 308 | R 1105 — anonyme (unicum pour le texte)
chant, chiffonie


11. Pleüst Dieu, le filz marie  [4:12]
i • Paris B.N. 12483 (chansons pieuses) | R 1177 — anonyme
chant, orgue, vièle


12. Lasse, pour quoi refusai   [7:51]
K • Paris, Ars. 5198, Chansonnier de l'Arsenal | R 100 — anonyme
chant, harpe, rebec


13. Toute seule passerai le vert boscage  [2:13]
k • Paris B.N. 12786 | Boogaard 175 — anonyme
chant, guitare sarrasine, flûte, rebec




PERCEVAL
Katia Caré, chant
Guy Robert, luths médiévaux, harpe, orgue portatif
Jean-Pierre Dubuquoy, rebec, vièle à arc
Alain Barré, flûtes traversières en roseau
Christophe Tellart, chiffonie






PERCEVAL : Perceval est né en 1981 d'une rencontre entre musiciens et comédiens. Ensemble, ils ont réalisé des recherches littéraires et musicologiques autour du Moyen Age; elles ont abouti à la réalisation de spectacles : Le jeu de Robin et Marion, Renart le Nouvel de Jacquemart Glélé, le Conte du Graal, Tristan et Yseut..., qui ont été joués dans le monde entier. Dans ce parcours, Katia Coré et Guy Robert, codirecteurs de l'ensemble, ont mis l'accent sur la poésie courtoise du XIIe au XIVe siècle. Poésie qui, par sa profonde originalité, son paganisme et ses côtés hérétiques, se démarque profondément du répertoire liturgique. À deux, ils ont effectué une étude approfondie sur les manuscrits de cette époque, tant sur le plan paléographique que sur le plan philologique. Ils ont ainsi entamé un travail de restitution thématique de ces grands textes sur la lyrique française (les trouvères) et, en collaboration avec Gérard Zuchetto, sur la lyrique provençale (troubadours et trobairitz).
Katia Caré et Guy Robert sont également professeurs de musique ancienne dans une école nationale.



PERCEVAL : Perceval was born in 1981 when a group of actors and musicians came together to carry out research into the literature and music of the Middle Ages. The result was a series of 'shows' – Le jeu de Robin et Marion, Renart le Nouvel by Jacquemart Glélé, Le Conte du Graal, Tristan et Yseut... – which have been performed all over the world. Katia Caré and Guy Robert, co-directors of the ensemble, put the accent on courtly poetry of the 12th-14th centuries: poetry which, in its profound originality, paganism and heretical aspect, is very different from the liturgical repertoire. Together, they pored over the manuscripts of that period, studying them from both a paleographical and a philological point of view. They set to work on a thematic reconstruction of the great texts of the French trouvères and, in collaboration with Gérard Zuchetto, those of the Provençal troubadours and trobairitz.
Katia Coré and Guy Robert also teach ancient music.



Restitutions musicales: Guy Robert

Enregistrement réalisé en collaboration avec l'Espace Kiron
Direction artistique : Yves Cresson
Enregistrement réalisé au Théâtre de l'Espace Kiron en juillet 1994
Recto : Marie de France (fin 13e s. / Document B.N.)
Conception graphique : AdGENCY (Paris)
Fabriqué en France Ⓟ ARION 1994



“La chanson d'ami”
Trouvères
Chansons de femme aux XIIe et XIIIe siècles
Chansons de femme in the XIIth and XIIIth centuries

Au Moyen Âge, dans une société d'hommes où la valeur est celle des armes et du tournoi, le rituel courtois, «nouvel art d'aimer» illustré tout d'abord au sud par les troubadours, va donner à la «dame» une place privilégiée dans son débat poétique. Elle peut devenir poète, débattre avec ses homologues masculins et être juge de leurs œuvres : la lyrique provençale nous laisse de nombreux témoignages sur l’œuvre et la vie de ces trobaïritz. En se déplaçant vers le nord, cette civilisation de l'amour va se masculiniser : la femme restera, bien-sûr très présente, mais, objet plus ou moins inaccessible du désir, son rôle deviendra plus abstrait. La poésie au féminin sera soit anonyme, soit composée par des hommes : à une exception près, nous ne connaissons pas de «trouveresse». En quittant sa source méditerranéenne, l'idéal courtois s'est affaibli : l'apparente libération n'a pas dépassé le verger secret d'une société éprise d'une création individuelle, presque hérétique : chez les trouvères, la chanson de femme se situe essentiellement comme un genre poétique.
In the Middle Ages, in a male society in which value was that of arms and tournaments, the courtly ritual, the 'nouvel art d'aimer', illustrated first of all in the south by the troubadours, gave the 'dame' (lady) a privileged position in its poetic debate. She could become a poet, discuss and dispute with her male counterparts and be a judge of their works: Provençal lyric poetry provides us with numerous accounts of the life and work of these 'trobairitz'. In moving to the north of France, this civilization of love became more masculine: woman was still very much present, of course, but as a more or less inaccessible object of desire; her role became more abstract. Poetry in the feminine was either anonymous or written by men (with one exception, we do not know of any female trouvères). In leaving behind its Mediterranean origin, the courtly ideal grew weaker: the apparent liberation did not go beyond the secret garden of a society in love with individual, almost heretic creation: with the trouvères, the 'chanson de femme' was essentially a poetic genre.
LA CHANSON DE FEMME DANS LA LYRIQUE FRANÇAISE AUX XIIe ET XIIIe SIÈCLES

C'est un corpus d'une grande importance thématique, qui témoigne, plus que les autres genres, de deux courants principaux : d'une part, une lyrique pré-courtoise, poésie popularisante d'origine très ancienne, voire celtique (P. Bec et A. Jeanroy) transmises oralement par les femmes et, d'autre part, la lyrique troubadouresque, essentiellement aristocratique. L'utilisation continuelle par les poètes (et les poétesses ?) d'interférences registrales entre ces deux courants forme le ton particulier de ce répertoire.

Ces chansons, relativement peu nombreuses mais présentes dans la plupart des manuscrits, obéissent à des formes bien définies : celles au discours impersonnel — les chansons de toile au caractère narratif que chantaient les femmes en tissant —, et celles qui se déclinent sur le mode du «je» lyrique :
— une partie des «chansons d'aube» ; elles sont peu représentées chez les trouvères : deux pièces complètes et quelques fragments ;
— la chanson de malmariée le plus souvent popularisante;
— la chanson d'ami : c'est le genre où le mélange des différents registres se fait le plus sentir ; on peut y rattacher certaines chansons d'aube ou de mal mariée.
THE CHANSON DE FEMME IN FRENCH LYRIC POETRY OF THE 12th AND 13th CENTURIES

The 'chanson de femme' forms a corpus of great thematic importance; more than the other genres, it reveals two main currents: on the one hand, pre-courtly lyric poetry, popularistic poetry of very ancient origin, Celtic even (P. Bec, A. Jeanroy), which was passed on orally by women and, on the other, the troubadouresque lyric, which was essentially aristocratic. The poets (and poetesses?) continually allowed the registers of these two currents to interact, which is what gives this repertoire its unusual tone.

These songs, which are relatively few but are to be found in most manuscripts, follow very definite forms: those with an impersonal discourse, the 'chansons de toile' (spinning or weaving songs), which are narrative in character, and those written in the first person:
— some of the 'chansons d'aube' (morning songs). They are not very well represented amongst the trouvères: we have two complete pieces and a number of fragments;
— the 'chanson de la malmariée' (song of the ill-wed woman), usually in a popular tone;
— the 'chanson d'ami': the genre in which the mixture of different registers is most obvious. Some 'chansons d'aube' and 'chansons de la malmariée' may belong to this category.
LA CHANSON D'AMI

Ce titre générique propose par Pierre Bec est la transposition française du terme portugais «cantiga de amigo». A l'origine le genre, popularisant, semble être limité à la chanson de jeune fille ; elle y chante sur un ton naïf la joie d'être aime ou la tristesse de la solitude. Ces deux thèmes se retrouveront dans la chanson traditionnelle, l'ami devenant alors le plus souvent le mari. C'est surtout dans la douleur de la séparation, «la départie» et ses infinies nuances dans l'expression des sentiments, que les interférences aristocratiques vont se produire, la chanson d'ami devient alors une canso (un grand chant) pour prendre le terme du manuscrit Douce (I).
THE CHANSON D'AMI

This generic term, put forward by Pierre Bec, is the transposition into French of the Portuguese term 'cantiga de amigo'. Originally this genre, in a popular tone, seems to have been limited to the 'chanson de jeune fille' (girl's song), in which the girl sings naïvely of the joy of being loved or the sadness of being alone. These two themes are to be found in the traditional chanson, the 'ami' then usually becoming the husband. lt is above all in the sorrow of separation, 'la départie', and its infinite nuances in the expression of feeling, that the aristocratic intrusions were to take place. The 'chanson d'ami' then becomes a canso (a courtly love-song), to borrow the term used in the Douce manuscript (see I below).
L'ENREGISTREMENT

Nous avons choisi, pour ce disque, un éventail le plus large possible des différents styles que présentent ces «chansons d'ami» : du popularisant rondet de carole à l'aristocratique «chanson de départie». Nous y avons inclus une aube dont la parente avec le sujet est évidente ainsi que deux chansons de malmariée (un rondeau et une ballette) qui évoquent quelques points intéressants du volet féminin de «l'érotique courtoise».

Nous donnons les textes dans leur intégralité. A l'image des manuscrits courtois, qui ne donnent pas toujours la musique et qui notent en tout cas celle-ci en dernier, l'interprétation est basée sur la déclamation et cherche, en privilégiant «le dire», à montrer l'aspect essentiellement lyrique de ce répertoire. Les musiciens ayant participé à cet enregistrement se sont confrontes à cette interprétation par une improvisation autour du texte pour en souligner la compréhension et en faire ressortir l'intensité dramatique. Afin de suggérer au mieux toutes les subtilités de sentiment que revêt ce mot «Amour», féminin à cette époque, nous avons voulu «dire» et jouer simplement, mettant ainsi le chant en harmonie avec la solitude et le silence qu'expriment si profondément ces poésies.

GUY ROBERT

THE RECORDING

For this recording, we have chosen as broad a selection as possible of the different styles presented by this 'chanson d'ami': from the 'rondet de carole' in a popular tone to the aristocratic 'chanson de départie'. We have included a 'chanson de l'aube' (alba) whose kinship with the subject is obvious, and also two 'chansons de malmariée' (a rondeau and a ballette) which evoke a few interesting aspects of the feminine side of 'l'érotique courtoise' (courtly eroticism).

We give the texts in their entirety. As in courtly manuscripts, which do not always give the music and which in any case note it last, the interpretation is based on declamation and, in giving priority to the spoken language, seeks to bring out the essentially lyric aspect of this repertoire. The musicians who took part in this recording approached this interpretation through improvisation around the text in order to make it understandable and bring out its dramatic intensify. In order to bring out all the subtleties of feeling in the word 'Amour' (which was feminine at that time), our performance is essentially simple, thus putting the singing in harmony with the solitude and silence expressed so profoundly by these poems.

GUY ROBERT
Translation: MARY PARDOE



Sources utilisées · Sources

Elles sont signalées pour chaque pièce ainsi que la numérotation Raynaud-Spanke pour les chansons et Van den Boogaard pour les rondeaux. La graphie utilisée est celle des manuscrits choisis.
The sources for each piece are indicated, along with the Raynaud-Spanke numbering for the songs and the Van den Boogaard numbering for the rondeaux. The spelling used is that of the manuscripts chosen.

• A : Arras, Bibl. munic. 657 — Chansonnier (Songbook) d'Arras
• C : Bern, Stadtbibliothek 389 — sans musique · without music
• I : Oxford, Bod., Douce 308 — sans musique · without music
• K : Paris, Ars. 5198— Chansonnier de l'Arsenal
• M : Paris, B.N. 844 — Manuscrit du roi
• T : Paris, B.N. 12615— Manuscrit de Noailles
• U : Paris, B.N. 20050 — Chansonnier de St-Germain
• a : Rome, Vatican Reg. 1490
• i : Paris, B.N. 12483 — (chansons pieuses · pious songs)
• j : Paris, B.N. 21677— Fragment Aubry (chansons pieuses · pious songs)
• k : Paris, B.N. 12786


Études utilisées pour la réalisation de cet enregistrement
Studies used in the making of this recording


La lyrique française au Moyen Age, Pierre Bec, 1978
Bibliographie des altfranzösischen Liedes, G. Raynauds, révision H. Spanke, 1980
Trouvères Melodien, Van der Wert, 1977-1979
Le manuscrit du roi (étude), J. Beck, 1938
Rondeaux et Refrains, Van den Boogaard, 1969
Rondeaux, Virelais und Balladen, F. Gennrich, 1921-1927
Les origines de la poésie lyrique en France, A. Jeanroy, 3ème éd. 1925
Les poésies de Gillebert de Berneville, Karen Fresco, 1988










1. MOLT M'ABELLIST QUANT JE VOI REVENIR

R 1451. Maroie de Diergnau [de Lille] - Manuscrit M
Les deux recueils qui contiennent cette chanson (M et T) n'ont conservé qu'un seul couplet de cette oeuvre de la seule «Trouveresse» dont le nom nous soit parvenu. Le style est, dans le registre courtois, celui de la chanson de jeune fille. On n'a que peu de témoignages sur l'existence de cette poétesse qui est la dédicataire d'une chanson du trouvère artésien Andrieu Contredit ; elle est très probablement la «Maroie», partenaire d'une «Dame Margot» dans un jeu parti (R 1744).

R 1451. Maroie de Diergnau [of Lille] - Manuscript M
The two chansonniers containing this song (M and T) have preserved just one verse of this work by the only 'trouveresse' whose name has come down to us. The style, in the courtly register, is that of the chanson de jeune fille. We have little evidence of the existence of this poetess, who is the dedicatee of a song by the Artois trouvère Andrieu Contredit; she is most probably the 'Maroie' who is to be found along with a 'Dame Margot' in a 'jeu parti' (R 1744) — jeu parti: a typically medieval poem, always in verse, with two protagonists in play.



2. CUIDOIENT LI LOSENGIER

R 1287. Gillebert de Berneville - Manuscrit a (texte) K (musique)
Chanson de jeune fille. Cette chanson est répandue dans de nombreuses sources, elle se trouve même deux fois dans le manuscrit U. L'attribution à Gillebert est presque générale. Les «Losengiers» et «Mesdisans» (trompeurs, flatteurs) forment, dans la réthorique courtoise la horde des ennemis des vrais amants. Cette chanson est remarquable par les interférences registrales qui president à sa composition : mélange de termes popularisants, courtois et chevaleresques. Cette particularité de langage donne au personnage le caractère naïf d'une jeune fille très sûre d'elle. Si le ton prête parfois à sourire, il n'est jamais comique et il suscite plutôt une sorte d'admiration joviale pour la jeune héroïne. Le caractère de la musique, proche de la danse accentue cet effet.

R 1287. Gillebert de Berneville - Manuscript a (text) K (music)
Chanson de jeune fille. This song is to be found in numerous sources. it even figures twice in Manuscript U. It is almost generally attributed to Gillebert. In courtly rhetoric, the 'losengiers' (scandalmongers) and 'mesdisans' (deceivers, flatterers) form the horde of true loyers' foes. This song is remarkable in the different registers that are to be found in it: a mixture of popular, courtly and chivalrous terms. This peculiarity of the language gives the speaker the naïve character of a girl who is very sure of herself. The tone sometimes makes one smile but is never comical; instead it arouses a sort of jovial admiration for the young heroine. The character of the music, dance-like, accentuates this effect.



3. JHERUSALEM, GRANT DAMAGE ME FAIS

R 191. Anonyme - Manuscrit M
Chanson d'ami dans le cadre d'une chanson de croisade. La femme pleure l'ami disparu. Cette chanson est un unicum sans musique du manuscrit, la mélodie choisie est celle d'une chanson de même métre : «Plaindre m'estue» de Robert de Reims (R 319 - Manuscrit K). Pierre Bec remarque que cette chanson devrait avoir la structure 2 x 2 coblas unisonans (strophes de mêmes rimes) : le premier ou deuxième couplet aurait dans ce cas disparu.

R 191. Anonymous - Manuscript M
Chanson d'ami within the framework of a crusade song. The woman laments the loss of her lover. This song is a unicum without music from the manuscript. The melody chosen is that of a song with the same metre: 'Plaindre m'estuet' by Robert de Reims (R 319 - Manuscript K). Pierre Bec points out that this song ought to have the structure 2x2 coblas unissonans (strophes with identical rhymes); in that case, the first or second verse must have disappeared.



4. VOUS NE SAVEZ QUE ME FIST...

R 1646. Anonyme - Manuscrit i (unicum)
Contrefactum pieux, probable, d'une chanson d'ami préexistante. L'ami devient Jésus, mais le langage est si amoureux qu'on peut aussi penser à une chanson d'amour déguisée, le prétexte pieux servant alors à dissimuler les sentiments.

R 1646. Anonymous - Manuscript i (unicum)
Probably a pious contrefactum of an already existing chanson d'ami. The lover becomes Jesus, but the language is so amorous that it may also be a disguised love-song, the pious pretext then serving to conceal the feelings expressed.



5. PLAINE D'IRE ET DE DESCONFORT...

R 1934. Anonyme - Manuscrit U (unicum)
Plainte de femme se reprochant d'avoir été trop dure ; ce texte est à rapprocher de celui de la chanson «Lasse pourquoi refusait» mais ici la séparation est irrémédiable et la lamentation prend des accents tragiques. Si le texte est un unicum, la mélodie, elle, est une des plus célébres qui soient, c'est celle de «Quan vei l'alauzetta mover» de Bernard de Ventadour. Le manuscrit U étant probablement la plus ancienne source courtoise, il s'agit de la première rédaction historique de cette mélodie (Les manuscrits troubadouresques sont beaucoup plus récents, si l'on excepte la partie du manucrit M qui donne, lui, le texte de Ventadour dans une traduction franco-occitane).

R 1934. Anonymous - Manuscript U (unicum)
Woman's lament; she reproaches herself for having been too hard. This text may be compared to that of the song 'lasse pourquoi refusait' but here the separation is irremediable and the lamentation takes a tragic turn. If the text is a unicum, the melody, on the other hand, is one of the most famous there is: it is that of 'Quan vei l'alauzetta mover' by Bernard de Ventadour. Manuscript U probably being the most ancient courtly source, it is the earliest historical version of this melody. (The troubadour manuscripts are much more recent, if we except the port of Manuscript M which gives Ventadour's text in a Franco-Occitan translation).



6. POR COI ME BAIT MES MARIS ?

R 1564. Anonyme - Manuscrit I
Ballette. Chanson de malmariée. Unicum du manuscrit pour le texte (sans musique). La mélodie se retrouve avec le texte du premier couplet (légérement modifié) comme teneur dans un motet de Guillaume de Machaut. L'argument développé par la femme appelle une explication : les «bréviaires» courtois accordaient aux amants le droit à l'amour, mais les manifestations de celui-ci étaient censées s'arrêter aux baisers et aux caresses. Vis-à-vis de ce rituel, avoir un ami et l'embrasser n'est pas une faute, d'où le désir de juste vengeance envers un mari qui ne respecte pas les règles.

R 1564. Anonymous - Manuscript I
Ballette. Chanson de malmariée. Unicum in the manuscript for the text (without music). The melody is found with the text of the first verse (slightly modified) as tenor in a motet by Guillaume de Machaut. The argument developed by the woman calls for an explanation: courtly 'breviaries' gave lovers the right to love, but manifestations of love were supposed to stop at kisses and caresses. Where this ritual is concerned, having a lover and kissing him is not an offence, whence the woman's desire to take her revenge on a husband who does not respect the rules.



7. SOUFRES, MARIS, ET SI NE VOUS ANUIT

Boogaard 193. Anonyme - Manuscrit a (add. post.)
Rondet de carole. Chanson de malmariée. Jeux sur les mots dans le goût de la deuxième moitié du XIII siècle : exploitation de différents sens de 'anuit'.

Boogaard 193. Anonymous - Manuscript a (later addition)
Rondet de carole. Chanson de malmariée. Play on words in the taste of the second half of the 13th century: an exploration of the different meanings of 'anuit'.



8. CANT VOI L'AUBE DU JOUR VENIR

R 1481. Gace Brulé - Unicum du manuscrit C (sans musique)
Chanson d'aube. La mélodie est prise d'une chanson de même mètre Amour ou trop tart me sui pris (R 1604a - manuscrit j).

R 1481. Gace Brulé - Unicum from manuscript C (without music)
Chanson d'aube. The tune is taken from a song with the same metre: Amour ou trop tart me sui pris (R 1604a - manuscript j).



9. L'ON DIT QU'AMORS EST DOLCE CHOSE

R 1937. Anonyme - Manuscrit U
Unicum du manuscrit pour la musique ; le texte se trouve aussi dans C. Plainte de femme trahie. Les textes et la musique des deux derniers vers de la première strophe forment un refrain dans le style de ceux des chansons de toile (refrain non signale chez Boogaard et Spanke). La référence à Ovide — ici l'allusion aux amours de Pyrame et Thisbé — n'est pas si rare chez les poètes courtois.

R 1937. Anonymous - Manuscript U
Unicum in the manuscript for the music, the text is also to be found in C. Lament of the betrayed woman. The words and music of the last two fines of the first verse form a refrain in the slyle of the chansons de toile (refrain not indicated in Boogaard and Spanke). The reference to Ovid — here the allusion to the loves of Pyramus and Thisbe — is quite common among courtly poets.



10. SILZ A CUI JE SUIS AMIE

R 1105. Anonyme - Manuscrit I
Virelai. Chanson de jeune fille dans le registre popularisant. Unicum du manuscrit pour le texte. La mélodie est utilisée comme teneur, avec le texte du refrain, dans un motet du Manuscrit de Montpellier.

R 1105. Anonymous - Manuscript I
Virelai. Chanson de jeune fille in a popular tone. Unicum in the manuscript for the text; the melody is used as tenor, to the words of the refrain, in a motet from the Manuscrit de Montpellier.



11. PLEÜST DIEU LE FILZ MARIE...

R 1177. Anonyme - Manuscrit i (unicum)
Contrefactum pieux, probable, d'une chanson d'ami préexistante. La chanson d'origine appartient très vraisemblablement au cycle de «Bele Aelis»; au couplet 2, un scribe a ajouté le mot «main» au-dessus du premier vers pour avoir le schéma du refrain bien connu : «Mis main s'est levé» mais cette addition fausse la mesure.

R 1177. Anonymous - Manuscript i (unicum)
Probably a pious contrafactum of an already existing chanson d'ami. The original song belongs fo the 'Bele Aelis' cycle: in the second verse, a scribe has added the word 'main' (hand) over the first line in order to obtain the pattern of the well-known refrain, 'Aelis main s'est levé', but this addition alters the metre.



12. LASSE, POUR QUOI REFUSAI

R 100. Anonyme - Manuscrit K
Quatre manuscrits contiennent cette chanson où la femme semble exprimer son repentir d'avoir été trop dure envers son ami. Mais ici la plainte est un prétexte, il s'agit en fait d'un texte où l'amie clame son amour et s'offre au bon vouloir de son amant. Selon l'usage courtois, elle rejette toute la responsabilité de sa froideur apparente sur les médisants (couplet 4).

R 100. Anonymous - Manuscript K
Four manuscripts contain this song, in which the woman seemingly expresses her repentance at having been too hard on her lover. But here the lament is a pretext; in fact, in this text she proclaims her love and gives herself up to her lover's pleasure. As was the courtly custom, she puts all the blame for her apparent coldness on the scandalmongers (verse 4).



13. TOUTE SEULE PASSERAI LE VERT BOSCAGE

Boogaard 175. Anonyme - Manuscrit k
Rondet de carole. Chanson de jeune fille

Boogaard 175. Anonymous - Manuscript k
Rondet de carole. Chanson de jeune fille