Les troubadours du Périgord / Tre Fontane
Le chant des troubadours, vol. 2




medieval.org
albacarma.com
Alba musica 244702 Collection Patrimoine
1993








Arnaud de MAREUIL
arr : Pascal Lefreuvre
1. La grands beutats e'l fins ensenhaments  [10:02]
2. L'ensenhaments e'l prètz e la valors  [4:07]

Bertran de BORN
arr : Hervé Berteaux
3. Rassa, tan creis  [4:53]
4. Ai ! Lemosin  [1:57]
5. Chasuts sui de mal en pena  [4:29]

Arnaud DANIEL
arr : Jean Luc Madier
6. Chançon do'lh mot son plan e prim  [2:19]
7. Sestina  [3:20]
8. Chançon do'lh mot son plan e prim  [2:35]

Guiraud DE BORNÈLH
arr : Thomas Bienabe
9. Reis Gloriós  [5:33]
10. Non puèsc sofrir qu'a la dolor  [8:09]
11. Lèu chanconeta e vil  [4:28]




TRE FONTANE

Jean Luc Madier : chant
Hervé Berteaux: flûtes, cornamuses
Maurice Moncozet : flûtes, chalémie
Pascal Lefeuvre : vielle à roue
Thomas Bienabe : oud
Jacques Détraz : tambour à anneaux, daf, bendhir, derbouka



Prise de son, mixage : Christian Laborde
Enregistгé en la collégiale de Ribérac en Périgord (mai 1993)

Illustration recto : Isabelle Braud
photos : Laurence Benne
maquette: Hervé Sarais.

Co-production : Centre Aquitain de Recherche sur les Musiques Acoustiques (CARMA), UVPCA Productions ;
Avec l'aide du Conseil Général de la Dordogne, du Conseil Régional d'Aquitaine,
de la Ville et du centre culturel de Ribérac et de l'ADAM 24.

Nous tenons à remercier particulièrement
Pierre Bес, Jean Roux, Gilles Mazières et Jean-Luc Delors.

Les transcriptions et traductions françaises des chansons
1, 2, 3 sont de R C Johnston,
5, 6 de Gérard Gouirand,
4, 8, 9, 10 de Pierre Bec,
11 de Jean Roux.
La transcription de tous les textes en graphie nord occitane a été réalisée par Jean Roux.

L'Ensemble Tre Fontane et Jean Roux ont réalisé un recueil complémentaire contenant
l'intégralité des textes dont les mélodies ont été conservées (éditions Princi Negre)
Contact Ensemble Tre Fontane : Centre Aquitain de Recherche sur les Musiques Acoustiques
d/o Laurence Benne Tél : 56 20 08 64 - Fax : 5620 1262
Collection Patrimoine









Après un premier disque consacré aux troubadours aquitains, qui groupait essentiellement les trois grands ancêtres, Guilhem de Peitieus, Jaufre Rudel et Marcabru, voici maintenant un second disque dédié aux troubadours périgourdins les plus célèbres : Arnaud de Mareuil, Arnaud Daniel, Bertrand de Born et Guiraud de Borneil....

Second disque ? En réalité, je dirais qu'il n'y a pas rupture d'un disque à l'autre, puisque le deuxième, lui aussi, reste bien dans le domaine de cette vaste Aquitaine, incluse dans "l'espace Plаntagenét", cet espace complexe qui а vu éclore près des deux tiers de la production troubadouresque.

Dans ce nouveau disque, et dans le livret qui le complète, on peut constater que l'art précieux du trobar a désormais atteint sa maturité, la voix troubadouresque est devenue plus ample, plus omniprésente, aussi bien par le nombre des poètes que par les genres représentés : depuis le chant d'amour du tendre Arnaud de Mareuil, encore ventadourien dans son style et son inspiration amoureuse, en passant par le complexe Arnaud Daniel, adepte du trobar clus et parfois aussi du texte gaillard et réaliste, Guiraud de Borneil, cet autre tenant de l'art difficile, mais en même temps poète de l'alba délicieuse que tout le monde connaît et partenaire poétique, dans une délicate tenson, d'une certaine dame Alamanda, elle-même trobairitz, Bertrand de Born enfin, ce grand troubadour, ce seigneur de la guerre, d'ailleurs plus guerrier qu'amoureux si l'on en croit ses œuvres, ce maître du sirventés politique, mais aussi poète "osé" qui n'hésite pas à déshabiller sa dame (du moles par la pensée) dans une de ses rares chansons d'amour.

Un riche éventail donc, et représentatif de l'espace poétique d'une époque et des principaux genres qui l'ont illustré ; mais éventail musical aussi, les motz n'étant jamais en ce temps-là séparés du son, puisque, des grands noms cités ci-dessus, le présent disque nous donne à entendre, d'une manière vivante et actualisée, par la voix ou les instruments, un florilège précieux des mélodies originelles, dont il s'efforce de rendre, à nos oreilles еt notre sensibilité d'hommes d'aujourd'hui, toutes les subtilités et l'éternelle fascination.

Pierre Bec


ARNAUD DE MARUEIL,
dont la carrière poétique se situe entre 1171 et 1190 était originaire de Mareuil sur Belle. Il fut le protégé de Guillaume VIII de Montpellier et du roi troubadour Alphonse II d'Aragon dont il devint le rival en amour. Il nous laisse 25 chansons, 5 saluts d'amour dont il fut le maître et un "ensenhaments". Sa poésie, son style d'une "harmonieuse élégance" (Pierre Вес) et d'une humilité qui se manifeste fréquemment, ne se démarquent jamais du thème du "fin amour", classique chez les troubadours.

BERTRAND DE BÒRN
est né vers 1140 à Bòrn de Salagnac, il devint co-seigneur du cháteau de Hautefort avec son frère Constantin, qu'il finit par expulser. Tous ses biographes font état de son caractère querelleur et batailleur, comme il est dit dans sa vida. La plupart affirme que c'est par intérêt, pour accroître sa fortune personnelle, d'autres, comme Augustin Thierry, font de lui un fervent patriote de l'indépendance de l'Aquitaine. Au-delà des faits, Bertrand de Bòrn est l'un des troubadours qui aura suscité, à travers les siècles le plus de commentaires, de légendes, de mythes. Il se retira dans l'abbaye de Dalon vers 1195 dans laquelle il mourut vers 1215. Il nous laisse 8 chansons, 1 ou 2 planhs, 2 chansons de croisade et une trentaine de sirventés politiques dont il est le maître incontesté. Sur les quatre mélodies conservées, 3 sont des contrefactos de Conon de Béthune.

ARNAUT DANIEL
Originaire de Ribérac, sa carrière poétique se situe environ entre 1180 et 1210. Son art de la rime riche et difficile font de lui un des maîtres incontestés du trobar ric. La sextine rapportée ici, forme dont il est sans doute l'inventeur, est un véritable tour d'adresse : 6 couplets de 6 vers, terminés par 6 mots-clés; par un système de déplacement tous ces mots occupent successivement toutes les positions possibles dans les strophes. Ces 6 mots, anodins (ongle, entre, oncle...) prennent, par la construction poétique, un sens véritable beaucoup plus subtil. Arnaut Daniel fut salué, parfois même imité tant par Dante que par Pétrarque.

GIRAUT DE BORNÈLH
De modeste condition, Giraut de Bornèlh devint le troubadour le plus réputé de son temps, comme en témoigne le nombre important de poésies transmises par les chansonniers et par la protection que lui accordèrent des grands seigneurs de l'époque : Ademard V, vicomte de Limoges, Alphonse III de Castille, Alphonse II d'Aragon. Il participa à la troisième croisade (1189 - 1192) avec Richard Cœur de Lion, Philippe Auguste, Frédéric Barberousse et séjourna à la cour d'Antioche. Il nous laisse environ 50 chansons, 15 sirventés moraux, 3 tensos, 2 chansons de croisade, 2 planhs, une pastourelle, une aube célèbre "Rei glorios...", une romance et une énigme. Preuve qu'il était aussi à l'aise dans le genre léger (trobar leu), que dans la poésie la plus sophistiquée (trobar clus). "C'est sans doute que son inspiration grave, laborieuse, un peu hautaine, fuyait d'instinct la banalité." (René Nelly) Originaire de la région d'Excideuil, les dates de sa vie sont incertaines (entre 1140 et 1240).