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L'empreinte digitale ED 13045
Paris, mayo de 1995
Trouvères à la cour de Champagne
01 - Bele Yolanz en ses chambres
seoit [5:39]
ms. de Saint-Germain-des-Prés
02 - Chrétien de TROYES. D'Amors,
qui m'a tolu a moi [6:04]
Paris BN, ms. fr. 12165
03 - Gace BRULÉ. Les
oiselez de mon pais [2:55]
ms. du Roi, Paris Bn 844
04 - Guiot de PROVINS. Molt
avrai lonc tans demoré [3:56]
ms. de Saint-Germain-des-Prés
05 - Conon de BÉTHUNE. Oimi!
Amors, si dure departie [3:36]
Paris, BN, ms. Cangé
06 - Conon de BÉTHUNE. Mout
me semont Amors [1:10]
Paris, BN, ms. Cangé
07 - Bien m'ont Amors
[1:40]
Paris, BN, ms. Cangé
08 - Bele Beatris
[6:08]
ms. de Saint-Germain-des-Prés
& Berne 389
09 - Quant revient et foille et
flor ~ L'autre jor ~ FLOS FILIUS [2:08]
motet, chansonnier de Montpellier
10 - Raoul de SOISSONS. Chanson
legiere a chanter (harpe) [1:05]
Paris, BN, ms. La Vallière
11 - Gilles de VIEUX-MAISONS. Chanter
m'estuet [2:42]
ms. du Roi & Ars. 542
12 - Aucun vont souvent ~ Amor
qui cor vulnerat ~ KYRIE ELEYSON [1:49]
motet, chansonnier de Montpellier
13 - THIBAUT de Champagne. Par
Dieu, Sire de Champagne [3:54]
Paris, BN, ms. Cangé
14 - THIBAUT de Champagne. Dame,
merci! [4:42]
Paris, BN, ms. Cangé
15 - Condicio ~ O nacio ~ Mane
prima sabbati [1:32]
motet, Roman de Fauvel
16 - Raoul de SOISSONS. Se j'ay
esté lonc tens en Romanie [3:54]
Paris, BN fr. 24406
17 - THIBAUT de Champagne. Li
rossignoz chante tant [2:46]
Paris, BN, ms. Cangé
18 - Gautier de COINCI. Quant
ces flouretes florir voi [4:01]
Paris, BN fr. 25532
19 - Plus bele que flor ~ Quant
revient et fuelle et flor ~ L'autrier joer ~ FLOS FILIUS
[0:53]
motet, chansonnier de Montpellier
ENSEMBLE VENANCE FORTUNAT
Anne-Marie Deschamps
Dominique Thibaudat, soprano
Catherine Ravenne, alto
Bruno Renhold, ténor
Gabriel Lacascade, baryton,
Philippe Desandré, basse
Guylaine Petit, harpe
TROUVÈRES
Desde fines del siglo XII hasta mediados del siglo siguiente, la corte
de Champaña brilló con un resplandor incomparable. Una
mujer, la condesa María de Champaña, fue la instigadora
de un verdadero mecenazgo literario y artístico. Hija de Alienor
de Aquitania y del rey de Francia Luis VII, casada con un hombre que
también se interesaba por las letras y los libros, Enrique I el
liberal, María fue una mujer culta, abierta a las nuevas
corrientes poéticas en boga en aquella época. Al igual
que su madre parece que protegió a los escritores y atrajo hasta
Troyes y Provins a los troveros que en el Norte de Francia cantaban el
amor cortesano como los trovadores del Sur.
En efecto, es en la tierra del Mediodía de Francia y en lengua
de oc que nació al comienzo del siglo XII esa poesía
lírica cortesana que exalta un ideal amoroso refinado y
exigente. Los trovadores fueron los primeros que cantaron el
«fin'amor» (amor perfecto) que se confunde con el deseo y
celebra el culto de la dama amada pero inaccesible. El servido amoroso
es calcado entonces del servicio feudal inspirando una poesía de
formas a menudo complejas y eruditas que se apoya sobre la
armonía entre los versos y la música a lo largo de las
estrofas. Más de 450 nombres de trovadores han llegado basta
nosotros, entre los cuales el primero de todos es Guillermo IX de
Aquitania, antepasado de María de Champaria a quien le
sucedieron Jaufré Rudel, poeta del «amour de loin»
(amor de lejos) o también Bernard de Ventadour quien,
según se cree, habría seguido a Aliénor de
Aquitania hasta Inglaterra, contribuyendo así al aporte y la
difusión de la cultura meridional en el Norte.
El talento de los trovadores en el Sur y luego de los troveros en el
Norte («trobar» en lengua de oc, «trover», en
lengua de oil) consiste en inventar, en «trouver» letras y
músicas. Es pues, en el sentido propio de la palabra, una
poesía lírica, es decir cantada, monódica, que se
expresa la mayor parte del tiempo a través de la
«canso» (canción), poema de alrededor de 40 a 60
versos repartidos en estrofas de 6 a 10 versos y a menudo terminados
con una tomada (vuelta, estrofa final). La presencia de Chrétien
de Troyes en la corte de Champaña y luego en la corte de Flandes
es ya un hecho admitido. En efecto, le dedica a María de
Champaña su «Chevalier de la Charrette», y es ella
sin duda quien le incita a exaltar en ese romance de inspiración
bretona y en términos cortesanos, el amor adulterino de Lancelot
y la reina Ginebra, esposa del rey Arturo. Conocido sobretodo por sus
obras novelescas (Erec y Enide, Cligès, Yvain o el caballero del
león, Perceval o la leyenda de Graal), Chrétien
compusó también algunos cantares líricos dentro de
la más pura tradición cortesana de moda por ese entonces
en Champaña.
El eco de las expediciones a ultramar y de las cruzadas, nutrió
siempre la inspiración de los troveros como Raoul de Soissons y
al mismo Teobaldo de Champaña; la lejanía de la dama se
confundía con la nostalgia de Francia, la fe en Dios no
hacía desaparecer el recuerdo de la que se amaba de lejos y la
sombra de la muerte siempre probable en tierra pagana
entristecía a veces el canto de amor.
El conde Tibaldo IX de Champaña (1201 - 1253), nieto de
María de Champaña, apreciaba también la
compañia de los poetas y reunía a su lado a Philippe de
Nanteuil, Raoul de Soissons y a tantos otros. Príncipe y
trovero, famoso en vida suya, es autor de 71 composiciones
líricas de todos los géneros. La leyenda cuenta que
habría compuesto algunas de sus obras para Blanca de Castilla
por quien sentía una pasión amorosa. Sin duda alguna,
nada de ello fue cierto, salvo el hecho que Teobaldo de Champaña
se destacó pintándose con los rasgos de un enamorado fiel
que se somete con gusto a las reglas de la cortesanía. Sus
poemas de factura refinada, a veces brillante y rebuscada, fueron
considerados desde el Medievo como los más bellos, delectables y
melodiosos que jamás se hayan oído.
Danielle Quéruel
1 - Bele Yolanz en ses chambres seoit
anonyme
Ms. de Saint-Germain-des-Prés
Les «chansons de toile» montrent une dame en train de
broder, de tisser ou parfois de lire, tout en revant a celui qu'elle
aime et dont elle attend le retour. D'une facture ancienne, ces
chansons anonymes, soutenues par la présence d'un refrain
nostalgique, ont un charme indéniable. Composées dans la
première partie du XIIe siècle, elles restèrent
longtemps à la mode.
2 - D'Amors, qui m'a tolu a moi
Chrétien de Troyes
Paris, BN, Ms fr 12165, transcription: Anne-Marie Deschamps.
L'activité littéraire de Chrétien de Troyes, connu
surtout par ses romans arthuriens, s'est exercée
vraisemblablement a la cour de Marie de Champagne entre 1160 et 1185.
Peut-être a-t-il composé aussi des chansons (deux peuvent
certainement lui être attribuées), traces d'une production
lyrique plus étendue. Il y développe avec talent les
thèmes les plus conventionnels de la poésie courtoise: le
pouvoir sans limite de l'amour, son ingratitude envers ce-lui qui le
sert loyalement, la sincérité de l'amant et la froideur
de la dame.
3 - Les oiselez de mon pais
Gace Brulé
Ms. du Roi, Paris, BN 844.
Gace Brulé, chevalier de petite noblesse, fut l'un des premiers
trouvères du Nord à chanter l'amour courtois,
Poète raffiné et capable d'une écriture savante,
il a laissé une œuvre importante (environ 69 pièces
peuvent lui 'être attribuées). L'évocation du chant
des oiseaux, entendu loin de la Champagne, renouvelle ici avec
délicatesse le motif traditionnel de la «strophe
printanière» qui ouvre souvent les chansons courtoises.
L'amour exalté est une passion fatale qui fait de la dame,
même lorsqu'elle accorde un baiser, un maitre sans pitié.
4 - Mot avrai lonc tans demoré
Guiot de Provins
Ms. de Saint-Germain-des-Prés,
transcription: Anne-Marle Deschamps.
La renommée de Gitiot de Provins, originaire de Champagne ou
d'Île de France, mais formé a la poésie en
Provence, atteignit toutes les cours d'Europe à la fin du XIIe
siècle. Il ne nous reste malheureusement de lui que cinq
chansons d'amour a côté d'œuvres plus
austères. Evoquet-il ici un voyage en Palestine qu'il fit
Bernard IV d'Armagnac? Le désespoir de l'amant
séparé de sa dame est un des motifs
développés dans la chanson courtoise; ému au
souvenir de la beauté de celle qu'il aime, le poète
chante son «douz mal» et sa crainte qu'elle ne l'oublie
alors qu'il est outre-mer.
5 - Oimi! Amors, si dure departie
Conon de Béthune
Paris, BN, Ms. Cangé.
Conon de Béthune, seigneur du Nord et trouvère, est
l'auteur d'une dizaine de chansons d'amour. Celle-ci, composée
à l'occasion de la troisième croisade, à laquelle
il participa auprès de Philippe-Auguste, en 1189 ou 1190,
réunit tous les thèmes de la
«chanson de croisade». Le poète dit sa souffrance
d'avoir à quitter son amie tout en affirmant sa foi en Dieu et
sa résolution à partir pour une guerre
sainte.
6 - Mout me semont Amors
Conon de Béthune
Paris, BN, Ms. Cangé.
Le trouvère Conon de Béthune dit ici comment il est venu
chanter ses œuvres à la cour de Champagne en
présence de la comtesse, d'Aliénor d'Aquitaine et de son
fils, le roi. Avant de parler d'amour, il s'en prend aux
Français qui se sont moqués de lui, homme d'Artois, et
qui ont blâmé son langage et son accent.
7 - Bien m'ont Amors
Motet anonyme du Manuscrit Cangé
transcription: J. Beck.
Né avec la polyphonie, le motet permet de chanter aussi bien les
thèmes religieux que profanes. Ici sont dépeints les
tourments éprouvés par l'amant devant une dame
impitoyable.
8 - Bele Beatris
Ms. de Saint-Germain-des-Pies & Ms. Berne 389.
La chanson de toile tout en gardant son caractère lyrique et
musical peut aussi etre «chanson d'histoire» et mettre en
scène un drame qui se joue entre deux personnages. La trame
narrative, ici, est simple, mais pathétique: Béatrice,
enceinte, est en pleurs car elle se croit abandonnée. Son ami
Hugues vient la chercher et accepte de l'épouser.
9 - Quant revient et foille et flor / L'autre jor / Flos filius
Motet anonyme du Chansonnier de Mortpellier; transcription: Y.
Rokseth.
Ce motet est construit sur la teneur Flos filius du répons
Stirps Jesse de Fulbert de Chartres.
10 - Chanson legiere a chanter et plesant a escoute
Raoul de Soissons
Harpe solo.
Paris, BN, Ms. La Vallière.
Le trouvère de l'entourage de Thibaut de Champagne compose ici
«en bon chevalier», une chanson légère
à entendre et plaisante à écouter pour toutefois
exprimer une profonde douleur
11 - Chanter m'estuet
Gilles de Vieux-Maisons
Ms. du Roi & Ars. 542,
transcription: AnneMarie Deschamps.
Familier de la cour de Marie de Champagne dès avant 1190, Gilles
de Vieux-Maisons est l'auteur de trois chansons courtoises; il y clame
son désir de composer et de chanter sans que son inspiration lui
soit donnée par l'amour. Le motif est original. Ses attaques
contre l'amour, contre la tromperie des femmes lui valurent des
protestations de la part d'autres poètes contemporains comme
Gace Brulé ou Conon de Béthune.
12 - Aucun vont souvent / Amor qui cor vulnerat / Kyrie eleyson
Motet anonyme du Chansonnier de Montpellier,
transcription: Y. Rokseth.
Les poètes courtois s'en prennent volontiers à la
médisance, à la convoitise et à la félonie
qui sont les plus grands ennemis de l'amour. Ce motet est
composé sur une teneur empruntée au Kyrie «cum
jubilo».
13 - Par Dieu, sire de Champaigne et de Brie
Thibaut de Champagne
Paris, BN, Ms. Cangé, transcription: Anne-Marie Deschamps.
Les trouvères s'amusent volontiers à débattre de
l'amour et donnent alors à leur chanson, de strophe en strophe,
la forme d'un dialogue souvent enjoué. On parle alors de
«débat», ou de «jeu-parti».
Celui-ci fut écrit avant 1234 alors que Thibaut de Champagne
n'était pas encore roi de Navarre. Le comte de Champagne
répond ici à l'un de ses amis, Philippe de Nanteuil,
lui-même seigneur et trouvère réputé, qui
s'étonne de sa tristesse et de sa décision de renoncer
à aimer. Thibaut se plaint d'Amour et l'accuse de perfidie
tandis que Philippe défend Amour et croit toujours à sa
loyauté envers les amants.
14 - Dame, merci!
Thibaut de Champagne
Paris, BN, Ms. Cangé, transcription: J. Beck.
Débat entre Thibaut de Champagne et une dame fictive qu'il
prétend aimer et dont il veut faire la conquête. Avec une
certaine préciosité il feint de demander ce que tous deux
deviendront après la mort; la dame se moque avec humour du comte
dont l'embonpoint (dont plaisante aussi Raoul de Soissons dans un autre
jeu-parti) lui paraît un signe de bonne santé et de
longévité.
15 - Condicio / O nacio / Mane prima sabbati
Motet du Roman de Fauvel,
transcription: L. Schrade.
La séquence du Lundi de Pâques Mane prima sabbati
célèbre la quête des trois Marie dans l'attente de
la Résurrection.
Sur cette teneur, un compositeur de l'école de Philippe de Vitry
(XlVe siècle) a bâti un motet dont les deux voix opposent
la grâce venue par la Vierge a la nation monstrueuse qui
préfère la lettre de la loi à la substance de la
lettre. La teneur donne une base rythmique peu usitée (3e mode
rythmique).
16 - Se j'ai esté tonc tens en Romanie
Raoul de Soissons
Paris, BN fr. 24406, transcription: Anne-Marie Deschamps.
Né vers 1215, Raoul de Soissons a participé à
trois croisades et connaissait bien la Palestine et le royaume de
Jérusalem. Auteur de six chansons d'amour et d'un jeu-parti
où il se met en scène en face de Thibaut de Champagne,
Raoul de Soissons célèbre la beauté et la douceur
de sa dame tout en faisant quelques allusions aux dangers courus
outre-mer.
17 - Li rossignoz chante tant
Thibaut de Champagne
Paris, BN, Ms. Cangé, transcription: J. Beck.
La mort poétique du rossignol - image superbe venue du bestiaire
médiéval comme dans d'autres chansons celle du cerf ou de
la licorne - ouvre cette chanson que le poète envoie a sa dame
pour attendrir son cœur. Strophe après strophe, il redit
les rigueurs de l'Amour et les épreuves que l'amant doit
accepter de supporter.
18 - Quant ces flouretes
Gautier de Coinci
Paris, BN fr. 25 532, transcription: Anne-Marie Deschamps.
Gautier de Coinci, né vers 1177, d'une famille noble du
Soissonnais, clerc et poète, s'éloigne de poésie
de cour lorsqu'il compose des Miracles en l'honneur de la Vierge. Des
chansons où le lyrisme marial s'inspire de
la poésie courtoise traduisent sa fervente
dévotion pour la Vierge Marie.
19 - Plus bele que flor / Quant revient et fuelle et flor /
L'autrier joer / Flos filius
Motet anonyme du Chansonnier de Montpellier,
transcription: Y. Rokseth.
Parler de la Vierge avec les termes que l'on destinait à une
dame courtoise est un procédé courant chez les
trouvères. Ce motet est un exemple de la juxtaposition du
lyrisme marial et de la chanson d'amour profane. La prière
à la Vierge est soutenue ici par une «reverdie»: la
fleur de Paradis rejoint les fleurs que cueille la jeune fille dans un
verger courtois.